Les massacres de 1994 au Rwanda : L'État français a bien aidé les assassins.05/07/20072007Journal/medias/journalnumero/images/2007/07/une2031.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Les massacres de 1994 au Rwanda : L'État français a bien aidé les assassins.

Des documents viennent d'être versés au dossier instruit par le Tribunal aux armées de Paris pour " complicité de génocide ", dans les massacres dont furent victimes au Rwanda près d'un million de Tutsis et d'opposants hutus au régime. Ils portent sur le rôle de la France dans ce pays, d'octobre 1990 à août 1994.

L'intérêt de ces documents réside dans le fait qu'il s'agit de notes de conseillers de Mitterrand, de procès-verbaux de conseils des ministres, de rapports du service d'espionnage français et de télégrammes rédigés par des diplomates alors en poste au Rwanda. Ces archives de l'Élysée remettent en cause la version officielle sur la politique de la France vis-à-vis de ce pays et apportent une multitude de preuves sur le fait que les dirigeants français ont, de 1990 à 1994, soutenu inconditionnellement le régime du président Habyarimana, alors qu'ils étaient parfaitement au courant de ses exactions et du génocide qu'il préparait contre les Tutsis.

Ainsi, en juin 1994, Mitterrand affirmait qu'on ne lui avait pas " signalé de drames à l'intérieur du pays ", ce qui était un mensonge grossier. Dès octobre 1990, alors que la France venait d'intensifier sa présence militaire et ses livraisons d'armes au régime rwandais, un conseiller militaire français, attaché à Kigali, signalait dans un télégramme diplomatique la multiplication des arrestations dont faisaient l'objet les Tutsis, ajoutant : " Il est à craindre que le conflit finisse par dégénérer en guerre ethnique. "

En février 1993 encore, la DGSE (le service d'espionnage français), très présente au Rwanda, rédigeait une note à propos des assassinats qui firent à l'époque 300 morts parmi les Tutsis. Elle affirmait qu'il s'agissait " d'un élément d'un vaste programme de"purification ethnique" dirigé contre les Tutsis " et programmé par les dirigeants rwandais.

En janvier 1994, quelques semaines avant le déclenchement du génocide, l'ambassadeur de France à Kigali faisait état dans un télégramme diplomatique des confidences d'un informateur selon lequel " 1 700 interhamwe (membres des milices pro-gouvernementales) auraient reçu une formation militaire et des armes pour cela [l'élimination physique des Tutsis], avec la complicité du chef d'état-major des FAR (Forces armées rwandaises) ". Et il poursuivait : " La localisation précise des éléments tutsis de la population de Kigali devrait en outre permettre d'éliminer 1 000 d'entre eux dans la première heure après le déclenchement des troubles. "

D'autres documents confirment que durant toute cette période, la préoccupation première des autorités françaises a été de soutenir le régime d'Habyarimana pour tenter d'endiguer l'avance du Front patriotique rwandais, soutenu par l'Ouganda et à ce titre considéré comme un représentant des intérêts anglo-américains. Quitte à être directement complice du massacre auquel il se livrait.

Tout cela ne constitue pas vraiment une révélation. La complicité de la France dans les massacres qui ont marqué le Rwanda entre 1990 et 1994 est un fait que seuls ses représentants officiels s'obstinent encore à nier. Mais ces documents officiels fournissent des preuves incontestables. Cela n'empêche pourtant pas l'État français de poursuivre le soutien politique et militaire à des dictateurs africains pourvu qu'ils défendent localement les intérêts de l'impérialisme français.

Partager