La droite a les mains libres à l'Assemblée, aux travailleurs de l'empêcher d'appliquer dans le pays ce qu'elle aura décidé13/06/20072007Journal/medias/journalnumero/images/2007/06/une2028.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Editorial

La droite a les mains libres à l'Assemblée, aux travailleurs de l'empêcher d'appliquer dans le pays ce qu'elle aura décidé

Sarkozy aura donc la majorité qui lui permettra, comme il l'a dit, de tenir ses promesses faites à la droite. Et certainement bien d'autres promesses, pas encore annoncées, de mauvais coups envers les classes populaires.

Mais s'il se croit les mains libres, il a tort ! L'ensemble des salariés ne se laissera pas éternellement pousser vers la misère. Ce qui guette tous les travailleurs, non seulement les mal ou sous-payés mais aussi les moyennement payés, ce sont les plans sociaux, les licenciements, avec la perte de leur salaire remplacé par des indemnités de chômage insuffisantes pour vivre, jusqu'à se retrouver au RMI et se faire reprocher par la droite d'être " assistés ".

Sarkozy, comme pendant les cinq ans de gouvernement passés et de majorité de droite, pourra continuer à " assister " le patronat, surtout le grand, par des sommes qui atteignent ou dépassent largement la centaine de milliards d'euros. Rien que le pourboire de cadeaux fiscaux qu'il vient de faire aux plus riches pèsera de 11 à 15 milliards d'euros sur le budget de l'État. Mais cela, c'est uniquement une aumône pour récompenser ses électeurs. Pendant cinq ans, il pense pouvoir continuer à répondre présent à toutes les sollicitations du grand capital.

Mais s'il a les mains libres à l'Assemblée, Sarkozy ne les a pas dans le pays. Le monde du travail peut être sujet à des colères soudaines et imprévisibles. Il l'a montré dans le passé. La moindre petite grève ignorée peut, en certaines circonstances, se propager comme une traînée de poudre. De la poudre, le patronat va en répandre partout et, sans qu'on sache d'où elle vient, de Sarkozy probablement, une étincelle enflammera le tout.

Un ministre de Sarkozy a dit que le Parti Socialiste entretenait la haine des patrons chez les travailleurs. C'est prêter beaucoup au Parti Socialiste. La haine des patrons, c'est le patronat lui-même qui la suscite.

Rien qu'un tout petit exemple : il vient de se dérouler sur une zone industrielle de l'étang de Berre, dans les Bouches-du-Rhône. Quelques centaines de travailleurs de Cofathec, une filiale de GDF employant 1 200 personnes et qui s'occupe de la maintenance des installations dans plusieurs entreprises des raffineries (Esso, Total, Shell, BP) et dans la sidérurgie à Arcelor (ex-Sollac) à Fos, se sont mis en grève le 25 mai. Cela faisait suite à une quasi-provocation de leur direction qui avait proposé une simple augmentation de 1,5 % accompagnée de 26 centimes pour la prime de déplacement. Les grévistes ont cherché à étendre la grève dans la zone industrielle, et cela a marché. Cela s'est étendu ; peu, mais étendu quand même. Cela n'a pas été à l'appel des syndicats, mais avec dix travailleurs par-ci, trois par-là, cela a touché plusieurs entreprises de la zone, en dehors de Cofathec.

Sarkozy et le patronat du voisinage ont dû prendre peur, car le sous-préfet lui-même est intervenu et le patron a cédé en grande partie aux revendications des grévistes.

Pourquoi ? Parce qu'aussi bien Sarkozy que le patronat environnant craignaient l'extension. Cela évidemment aurait été gênant à la veille d'une élection. Mais la crainte était là quand même.

Bien sûr, ils veulent faire une grande partie de leurs mauvais coups cet été, pendant les vacances. Mais l'écoeurement sera d'autant plus grand à la rentrée.

La conclusion est que Sarkozy aura une majorité de béni-oui-oui dans son Assemblée, qui voteront, comme un seul homme, ce qu'il voudra.

Mais quant à tout faire appliquer, c'est un autre problème. Ce n'est pas l'Assemblée qui lui mettra des bâtons dans les roues, ce sont les grèves. De Gaulle a connu cela. Sarkozy est trop jeune pour avoir retenu toutes les leçons de l'histoire, mais chacun doit faire son expérience !

Arlette LAGUILLER

Éditorial des bulletins d'entreprise du 11 juin

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