Voter pour Arlette Laguiller, ce sera dire que les travailleurs se préparent à imposer par la lutte ce que la droite a toujours refusé et la gauche jamais cédé.13/04/20072007Journal/medias/journalnumero/images/2007/04/une2019.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Tribune de la minorité

Voter pour Arlette Laguiller, ce sera dire que les travailleurs se préparent à imposer par la lutte ce que la droite a toujours refusé et la gauche jamais cédé.

J -12, J -11... Les médias spéculent sur l'ordre d'arrivée des " favoris " (Sarkozy, Royal, Bayrou et Le Pen), et voudraient faire monter la fièvre. Mais l'électorat est surtout indécis. Les partisans de l'ordre et de la propriété, par embarras du choix ! Les classes populaires, parce que si la hantise de voir Sarkozy au pouvoir est grande, il en coûte autant de voter pour Ségolène Royal et ses choix pro-patronaux et réactionnaires, à moins de se boucher les oreilles !

Bien significatif, son projet de Contrat Première Chance (CPC) pour les jeunes sortant de l'école sans qualification. Il s'agirait de les aider à trouver un travail. Peut-être, pour trois mois, un an ou plus " s'ils donnent satisfaction à leur patron ". Donc précaire et soumis à l'arbitraire patronal. Mais surtout, d'offrir à des patrons d'entreprises artisanales ou de commerce (qui pour petits n'en sont pas moins rapaces !) une main-d'oeuvre gratuite pour un an : tous frais payés par l'État. Du jamais vu ! Même Villepin ne l'avait pas osé avec son CPE qui, il y a un an, a fait exploser une partie de la jeunesse.

D'où des pleurs et des grincements de dents dans les milieux du PS et du PC qui militent pour la victoire de Ségolène Royal. Pourtant affirmatif (comme disait son colonel de père...), la candidate et sa conseillère " sociologue du travail " confirment : il s'agira bien d'un nouveau et super-cadeau au patronat, qui n'embauchera pas davantage mais disposera d'une main-d'oeuvre gratuite.

Tout est à l'avenant dans le programme de Ségolène Royal. Quelques miettes dérisoires pour les classes populaires, mais le magot pour le patronat... L'État, les conseils régionaux, les communes vont continuer à débourser sans que rien ne contraigne " les entreprises " (entendez leurs propriétaires et leurs actionnaires) à ne pas licencier ou fermer boutique. Les caisses publiques continueront à se vider de ces largesses, au détriment des services publics de santé, éducation, transport, logement.

Sarkozy et Royal se copient :

- " J'investirai massivement dans le développement du commerce et de l'artisanat ", dit-le premier. " Soutien à la formation et à l'embauche dans l'artisanat, qui est la première entreprise française ", dit la seconde.

- " Dès le mois de juin, je réunirai une conférence avec les partenaires sociaux ", dit l'un. " Conférence nationale sur les salaires, les revenus et la croissance afin d'engager un véritable dialogue social sur le partage des profits ", dit l'autre.

- " Avec les partenaires sociaux, je créerai la sécurité sociale professionnelle ", dit l'un. " Mise en place d'une sécurité sociale professionnelle en cas de perte d'emploi ", dit l'autre.

Etc. etc. Et la candidate du PS, " excédée " paraît-il des critiques de ses amis, de leur lancer : " Mais on fait quoi ? Que ceux qui ont de meilleures idées le disent ! ".

Tout dépend au bénéfice de qui, les meilleures idées. Si c'est pour servir les propriétaires et les patrons, Ségolène est parfaite, les habits et l'impôt sur la fortune adaptés. Mais aux travailleurs et leurs familles, il faut une autre perspective. Déjà tracée par notre camarade Arlette Laguiller avec son programme d'objectifs radicaux lancé en 1995, dans lequel une fraction non négligeable de la population se retrouve à chaque présidentielle, que ce soit sur son nom ou sur celui d'Olivier Besancenot qui en a repris les grandes lignes. Interdiction des licenciements, embauche massive dans les services publics, augmentation conséquente des salaires, du smic et des minima sociaux, retrait de toute aide financière au patronat. Et pour assurer tout cela, contrôle des travailleurs sur la production et les profits. Bref, bousculer le mur de l'argent, au lieu de s'aplatir devant comme les dirigeants du PS (et à leur suite du PC) depuis Léon Blum. Même la grève générale, en 1936, trop tôt arrêtée, n'a pas suffi à s'en faire obéir ! Les politiciens " de gauche " sont à la vie à la mort pour la bourgeoisie. Les travailleurs ne mettront donc au programme leurs revendications vitales que par leurs propres forces et leurs propres moyens, en ne comptant que sur eux-mêmes, dans les entreprises et dans la rue.

Dans quelques cinémas en France, sort un film intitulé " Lip, l'imagination au pouvoir ", qui retrace la longue lutte en 1973, contre la fermeture de l'entreprise horlogère de Besançon. " Ici on fabrique, on vend, on se paie "... Collectivement, plus d'un millier d'ouvriers et surtout d'ouvrières avaient décidé de se payer sur le capital, sur les stocks de montres planqués puis revendus, et de reprendre eux-mêmes la production. Leur conscience et leur combativité les ont conduits, pour se défendre, à bousculer l'ordre social. Voilà qui donne des idées (mais pas à Ségolène Royal !). Aujourd'hui où fermetures d'entreprises et licenciements ne sont pas des exceptions mais la gangrène, des centaines de combats de ce type, coordonnés, sous une direction commune et démocratique, rendrait possible ce qui est vital et nécessaire.

Le vote des travailleurs le 22 avril prochain pour Arlette Laguiller qui a donné le coup d'envoi d'objectifs radicaux, sera un encouragement pour ces luttes d'ampleur qu'il est indispensable de préparer.

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