De l'art d'escamoter les vrais problèmes29/03/20072007Journal/medias/journalnumero/images/2007/03/une2017.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Editorial

De l'art d'escamoter les vrais problèmes

Le chômage se maintient à un niveau inacceptable, d'autant plus qu'Airbus, Alcatel et bien d'autres grandes entreprises annoncent les unes après les autres des plans de suppressions d'emplois. Les emplois précaires, les temps partiels imposés qui permettent tout juste de survivre se multiplient. Le niveau de vie de la population laborieuse régresse, y compris pour les travailleurs qui ont un emploi stable. Plus de 1 200 000 ménages sont sur les listes d'attente pour obtenir un logement social. Au total il manque certainement plus de 2 000 000 de logements à loyers abordables pour mettre fin à la scandaleuse crise du logement qui condamne autant de familles à s'entasser chez des proches ou à vivre dans des taudis, voire dans la rue.

Est-ce cela qui est au coeur des débats dans cette campagne présidentielle ? Pas du tout, en ce qui concerne les deux candidats dont on nous dit qu'ils ont le plus de chances d'être présents au second tour. La principale préoccupation de Sarkozy, c'est son projet de " ministère de l'Identité nationale et de l'Immigration ". On ne voit pas très bien en quoi pourrait consister ce " ministère de l'Identité nationale ". Quant à y adjoindre " l'immigration ", on en a un avant-goût avec l'affaire de la maternelle de la rue Rampal, à Paris, et le climat de rafle au faciès et de chasse aux enfants qui l'accompagne et qui rappelle de sinistres périodes de l'Histoire. Ségolène Royal, qui se prétend de gauche, a dénoncé cette proposition, mais pour s'empresser de se faire à son tour le chantre de cette " identité nationale " et de proposer à chaque Français d'avoir chez lui un drapeau tricolore à accrocher à sa fenêtre le 14 juillet. Quelle belle proposition pour les chômeurs... et encore plus pour les sans-logis ! Ces gens-là se moquent de nous, en faisant passer ces escarmouches ridicules pour les problèmes de l'heure.

La seule solution que Sarkozy met en avant pour améliorer le niveau de vie des travailleurs, c'est de " travailler plus pour gagner plus ". C'est se moquer des chômeurs, des travailleuses et des travailleurs en temps partiel imposé, des ouvriers rivés à la chaîne et que leurs horaires de travail, imposés par le patron, laissent exténués ! Mais c'est dans l'ordre des choses car Sarkozy est le représentant direct des intérêts du grand patronat.

Mais Ségolène Royal ne propose guère mieux. Sa promesse de passer le smic à 1 500 euros brut... dans cinq ans (niveau qu'il atteindra sans doute par le seul effet des réajustements automatiques dus à l'augmentation du coût de la vie) ne l'engage en fait à rien. Et plutôt que de défendre les revendications du monde du travail, elle préfère chasser sur les terres de Sarkozy et de Le Pen, dans l'espoir de récupérer des voix parmi ceux qui s'imaginent que la possession d'une carte d'identité française en fait les égaux de patrons et de nantis que leur " patriotisme économique " n'empêche pas de s'installer, ou de domicilier leurs capitaux, dans des paradis fiscaux plus ou moins exotiques.

Dans ce concert de discours plus hypocrites les uns que les autres, il est nécessaire de faire entendre la voix des travailleurs, pour dire certes à la droite, dans sa version brutale à la Sarkozy, ou dans sa version " light " à la Bayrou, que nous l'avons assez vue. Mais aussi pour dire à la gauche que face à la persistance du chômage, à la baisse du niveau de vie des classes populaires, à la crise du logement, il n'y a pas d'autre solution réaliste que de prendre sur les profits des grands groupes capitalistes pour financer les investissements nécessaires.

Je me présente à ces élections pour permettre aux travailleurs d'exprimer leur rejet de la droite, tout en disant à la gauche que le monde du travail attend d'elle autre chose que des discours creux.

Les voix qui se porteront sur ma candidature seront autant d'encouragements, pour tous ceux que la situation actuelle désespère, à ne pas se résigner, en leur montrant qu'une fraction de la classe ouvrière se prépare à imposer par la lutte ce que la droite leur refuse, et que la gauche n'est pas prête à leur accorder.

Arlette LAGUILLER

Éditorial des bulletins d'entreprise du 26 mars

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