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Dans le monde
Espagne : Joutes politiciennes sur fond de terrorisme
La décision du gouvernement socialiste espagnol de placer, le 1er mars dernier, le militant de l'ETA De Juana Chaos en régime de prison " atténué ", pour l'hospitaliser à l'hôpital de San Sebastian, après une grève de la faim de 115 jours, et dans un état qui met sa vie en danger d'après les médecins, a été le prétexte d'une offensive sans précédent du Parti Populaire (la droite) contre le gouvernement Zapatero.
Accusant celui-ci de céder devant le terrorisme, d'être disqualifié, le PP a mobilisé dans tout le pays le 10 mars, et a réuni des dizaines de milliers de manifestants à Madrid.
De Juana Chaos n'est certainement pas un enfant de choeur. Il a été condamné à vingt ans de prison, peine qu'il a purgée, pour avoir d'après la justice espagnole assassiné vingt-cinq personnes. Après sa libération, il avait été de nouveau condamné à de la prison ferme pour un délit de presse, et c'est pour protester contre cette nouvelle condamnation qu'il avait entamé cette grève de la faim.
Dans cette affaire, le PP tablait sur le rejet par la grande majorité de la population espagnole du terrorisme de l'ETA, et sur le ressentiment des victimes de ce terrorisme. Mais il était manifestement mu par des raisons politiciennes, dans sa lutte pour le pouvoir avec le Parti Socialiste. Car vis-à-vis des prisonniers de l'ETA il n'a pas toujours fait preuve de l'intransigeance qu'il exige aujourd'hui du Parti Socialiste.
Le quotidien El Pais a opportunément rappelé comment un autre militant de l'ETA, Iñaki Bilbao, fut condamné en 1983 à cinquante-trois ans de prison pour meurtre. En septembre 2000 le gouvernement, alors dirigé par le PP, le fit libérer, au motif de son " évolution positive " en prison. Deux ans plus tard Bilbao abattait d'une balle dans la nuque un conseiller municipal socialiste de la ville de Orio. Lors de son procès il lança au juge : " Viens ici si tu en as. Le jour où je te mettrai la main dessus, je te mettrai sept balles dans la peau ".
Les tueurs de l'ETA ne méritent certes aucune sympathie. Mais les dirigeants du PP, ce parti post-franquiste, qui pour des raisons purement politiciennes spéculent sur le rejet que l'ETA suscite, ne sont pas moins méprisables.