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Dans les entreprises
EADS-Lagardère : Histoire du soutien sans faille de l'État
Le groupe Lagardère est, avec le groupe allemand DaimlerChrysler, l'un des deux « actionnaires de référence » (les seuls à avoir le pouvoir de décision) du consortium EADS qui détient Airbus à 80 %.
Avec 10 000 suppressions d'emplois dans le groupe, plus des milliers d'autres chez leurs sous-traitants, Lagardère et DaimlerChrysler veulent faire payer aux salariés les frais de leur gestion. En tant qu'actionnaires principaux, ils en sont les seuls responsables, mais eux comptent bien tirer leur épingle du jeu quoi qu'il arrive.
À l'annonce, en juin 2006, d'un retard de plusieurs mois sur la finition des Airbus A380, le cours de l'action EADS chuta de 26 %. Mais les dirigeants et gros actionnaires d'EADS avaient déjà mis leur argent à l'abri.
Ainsi, un des deux coprésidents d'EADS, Noël Forgeard, avait vendu ses actions et celles de ses enfants peu auparavant, quand le cours était encore au plus haut. Cela lui avait rapporté 3,4 millions d'euros.
Quant à Lagardère, c'est dès le 4 avril 2006 qu'il avait annoncé céder 7,5 % du capital d'EADS, sur les 15 % qu'il détenait. DaimlerChrysler avait fait de même. Peu après, le titre EADS commençait à baisser, le retard de livraison de l'A380 étant confirmé. Dans le même temps, les salariés de la Sogerma à Mérignac en Gironde, qui travaillait en sous-traitance pour EADS, apprenaient de ce même Forgeard que leur usine allait fermer : 1 050 emplois allaient disparaître, qui faisaient vivre directement ou indirectement des milliers de familles de la région.
À avoir voulu jouer au plus fin (aux yeux des autres actionnaires), Forgeard dut quitter la présidence d'EADS, mais avec un bon magot en poche. Lagardère, lui, ne fut en rien inquiété. Aucun dirigeant politique ne lui demanda de comptes ni n'exigea quoi que ce soit de lui. Comment s'en étonner ?
Le groupe Lagardère, qui est un poids lourd de l'aéronautique, de l'espace, de l'armement, contrôle aussi une bonne partie des médias et de l'édition et a, tout au long de son existence, toujours bénéficié du soutien de l'État. Cela, sous tous les gouvernements, quelle que soit leur couleur politique. Il y eut les largesses de Giscard, sous forme de commandes d'État à la société d'armement Matra, noyau originel du groupe ; la remise à flot de cette même société avec de l'argent public, au milieu des années quatre-vingt sous Mitterrand ; puis de nouveau au début des années quatre-vingt-dix.
Et surtout, il y eut le cadeau de Jospin, qui vendit le groupe public Aérospatiale à Matra-Lagardère pour 2 milliards d'euros, alors que sa valeur était estimée entre 9 et 24 milliards ! En fusionnant ensuite avec des firmes allemandes et espagnole, le groupe allait donner naissance à EADS.