Un pacte mal réchauffé16/02/20072007Journal/medias/journalnumero/images/2007/02/une2011.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Tribune de la minorité

Un pacte mal réchauffé

Ségolène Royal a enfin «dévoilé» son programme, son «pacte présidentiel» comme elle dit, en alignant 100 promesses. Ce serait un virage à gauche, selon les commentateurs, et une filiation revendiquée avec les 110propositions de Mitterrand en 1981.

De ce point de vue, elle est encore plus timorée que Mitterrand qui, il y a 25 ans, parlait de «dépasser le capitalisme»... et une fois élu avait asséné aux travailleurs la rigueur et le blocage des salaires. Elle a pris soin de s'adresser d'abord aux patrons, en multipliant les paroles rassurantes. Elle ne parle pas de toucher aux 65milliards d'aide que l'État consacre aux entreprises (6 fois le trou de la Sécu), ni d'aucune mesure contre les licenciements. Elle encouragera «l'esprit d'inventivité», et exprime sa «reconnaissance aux entrepreneurs de prendre des risques». Pour le coup, ça promet!

Ensuite, ensuite seulement, il y en a eu un peu, un tout petit peu, pour tout le monde: les jeunes, les femmes, les immigrés, les chômeurs, les retraités, les salariés. C'est bien là qu'est l'arnaque: on commence par rassurer les riches, puis on s'apitoie sur les pauvres en ne leur promettant guère plus que le peu qu'ils ont déjà. Il n'est pas difficile d'imaginer qui sera vraiment servi!

La candidate du PS parle d'un smic à 1500 euros, sans préciser si c'est brut ou net, «dès que possible». Or Jospin nous avait déjà fait le coup en expliquant qu'au gouvernement, rien n'est possible! Le pouvoir d'achat des salariés est insuffisant, reconnaît-elle. Mais elle s'en remet à «une conférence nationale sur les salaires, réunissant les partenaires sociaux»: s'il faut attendre le feu vert des patrons, nos salaires ne sont pas prêts d'augmenter!

Pour combattre le chômage, elle propose 500 000 «emplois tremplin». Difficile de ne pas y voir des emplois jeunes-bis, ces contrats précaires dont seule la moitié des 700 000 promis par Jospin furent effectivement signés. Quant à la précarité, elle entend faire du CDI «la règle», sans rien dire de l'intérim ou des CDD, seulement en supprimant le CNE. Coïncidence? Le Canard Enchaîné révélait la semaine précédente que le nombre de CNE conclus chaque mois s'effondre...

Royal dit qu'elle veut augmenter de 5% les petites retraites, sans dire desquelles il s'agit. Sa proposition de mensualiser le minimum vieillesse est du même goût: 7455 euros répartis sur l'année ne feront jamais que 621euros chaque mois (même Bayrou propose plus...)! Surtout, elle se garde bien d'annuler la loi Balladur de 1993 pour en revenir à la retraite à taux plein au bout de 37 années et demie de cotisations pour tous.

Royal promet aussi la construction de 120 000 logements sociaux par an. À ce rythme, il faudra dix ans pour loger les 1 200 000 personnes sur liste d'attente, sans parler de régler le problème des 3millions de mal logés. Quant aux services publics, elle n'en dit rien, ou si peu: «pôle public entre EDF et GDF», mais pas de retour en arrière sur les privatisations; pour l'école «17 enfants par classe»... en CP et en CE1 dans les ZEP, mais combien pour les autres?

Salaires, emplois, logement: aucun engagement sérieux à la hauteur des problèmes rencontrés par le monde du travail! Pas un mot pour prendre aux riches afin de donner aux pauvres.

La candidate socialiste se contente de faire croire qu'il est possible de réconcilier patrons et salariés, dans une logique «gagnant-gagnant», comme disent également... les patrons et Sarkozy. Mais la compétitivité économique dont elle parle, c'est la prospérité pour une infime minorité, et la surexploitation et les licenciements massifs pour les travailleurs.

Sarkozy comme Royal nous proposent leur «pacte» et se posent en futur président «de tous les Français». Il n'y a rien à attendre de ces bonimenteurs. Un programme pour les travailleurs, c'est celui que proposent les révolutionnaires, et en particulier Arlette Laguiller, la candidate de Lutte Ouvrière. Seule l'extrême gauche nous propose un geste électoral utile, celui qui peut inquiéter les puissants. Il s'agit de se faire craindre du grand patronat et de ceux qui le représenteront au gouvernement à l'issue des élections. De rassembler nos forces dans les luttes, de faire converger tous nos mécontentements en un mouvement social irrésistible. Et ceci, avant comme après les prochaines élections.

Lydie GRIMAL

Convergences Révolutionnaires n° 49 (janvier-février 2007) Bimestriel publié par la Fraction

Dossier: gauche, droite, gauche... Le piège de l'alternance

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