Procès de l'Erika : Après avoir mazouté les oiseaux, Total veut noyer le poisson16/02/20072007Journal/medias/journalnumero/images/2007/02/une2011.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Procès de l'Erika : Après avoir mazouté les oiseaux, Total veut noyer le poisson

Le procès de la marée noire consécutive au naufrage de l'Erika, le 13 décembre 1999, s'est ouvert le 12février. Les plaignants sont essentiellement les associations représentant les communes situées sur les 400km de côtes polluées par les 30 000 tonnes de fioul lourd lâchées par l'épave.

Pour tenter de diluer sa responsabilité, Total a mobilisé une armée d'hommes en robes aussi noires que le fioul, mais offrant certainement de meilleurs états de service que le navire poubelle qu'était l'Erika. Ainsi le procès portera-t-il non seulement sur la responsabilité de Total, mais aussi sur la validité des certificats de navigation, la réputation de l'armateur, la rapidité de réaction des sauveteurs, voire la compétence du capitaine.

Mais Total était parfaitement averti de tout cela, depuis l'état du navire jusqu'à celui de la mer, depuis l'expérience de l'équipage jusqu'aux salaires qui lui étaient versés. La plus grande société privée française et cinquième groupe pétrolier au monde sait pertinemment à qui il confie ses cargaisons, dans quelles conditions, à quel prix et avec quelle marge de sécurité. On peut même supposer qu'il ne confie pas sa cargaison la plus précieuse, la vie de son PDG, à la première compagnie aérienne «low cost» venue, mais à des appareils et des équipages offrant toutes les garanties!

Total a donc affrété en toute connaissance de cause, pour une seule livraison, l'Erika, pétrolier à bout de souffle, muni de certificats douteux et servi par un équipage de hasard. Puis il a exigé un départ immédiat malgré le mauvais temps. Ce n'était pas de l'imprudence mais un risque calculé. Exactement le même que celui que prend n'importe quel capitaliste en laissant en fonctionnement des machines dangereuses. Le profit immédiat que le propriétaire escompte vaut bien, selon lui, le risque d'accident encouru par les travailleurs...

Malgré sa responsabilité évidente, fruit non pas du hasard mais d'une politique assumée, il n'est pas du tout certain que le groupe pétrolier soit condamné à réparer les dégâts. Car s'il a fallu plusieurs catastrophes pour imposer que les nouveaux pétroliers aient une double coque (mais les vieux naviguent toujours) et qu'ils soient régulièrement inspectés (mais il y a peu d'inspecteurs), il y a longtemps que les grandes sociétés sont dotées d'une double et même triple coque judiciaire, fournie et entretenue régulièrement par l'État lui-même.

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