Guinée : Après deux semaines de grèves et manifestations, les forces armées tirent sur les manifestants24/01/20072007Journal/medias/journalnumero/images/2007/01/une2008.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Guinée : Après deux semaines de grèves et manifestations, les forces armées tirent sur les manifestants

Plusieurs dizaines de milliers de manifestants ont marché, lundi 22 janvier, sur le siège du pouvoir à Conakry. Les forces de répression qui s'interposaient ont tué au moins une vingtaine de personnes, tandis que 150 autres étaient blessées. Des dirigeants syndicaux étaient arrêtés, puis libérés le soir même.

Depuis le 10 janvier, la population de la capitale et des principales villes de ce pays de neuf millions d'habitants manifeste, ferme boutique, déserte les bureaux et les administrations, répondant au mot d'ordre de grève lancé par les deux principales centrales syndicales. Celles-ci s'opposent au pouvoir du dictateur, Lansana Conté, un militaire qui a commencé sa carrière au sein de l'armée française, en place depuis avril 1984, à la suite d'un coup d'État survenu après la mort de son prédécesseur, Sékou Touré.

En Guinée-Conakry, ni les richesses du sous-sol -bauxite, diamant, or et fer- ni les produits de l'agriculture destinés à l'exportation -café, coton et fruits- ne profitent à la population. Ils engraissent les groupes capitalistes occidentaux: ceux de France, l'ancienne puissance coloniale mais aussi ceux des États-Unis, et au passage la famille Conté et ses proches. L'un d'entre eux, Mamadou Sylla, ancien président du patronat guinéen et première fortune du pays, inculpé pour détournement de fonds d'État, vient d'être libéré le 17 janvier par le président en personne.

Cette provocation a fait grimper d'un cran la colère des manifestants qui, outre le remboursement des fonds dérobés à l'État, réclamaient la baisse des prix du carburant et des produits de première nécessité.

Les habitants de Guinée-Conakry n'en sont pas à leur premier mouvement de colère. En juin 2005, des manifestations de jeunes étudiants et lycéens contre la dictature et la vie chère avaient été réprimées. Il y eut 21 morts et de nombreux blessés. En février 2006, une grève dans les services et les administrations avait permis d'obtenir une revalorisation des salaires. Mais en mars le franc guinéen subissait une dévaluation qui aggravait un peu plus encore les conditions de vie de la partie la plus pauvre de la population. En mai, la subvention sur le carburant était supprimée et les tarifs des transports et des denrées flambaient. En juin, un nouveau mouvement mobilisait les fonctionnaires pour une augmentation de 30% des salaires. Les forces de répression faisaient encore une vingtaine de morts parmi les manifestants.

Cette fois, l'épreuve de force est à nouveau engagée entre le pouvoir de Lansana Conté et une partie de la population. Le vieux dictateur malade refuse jusqu'à présent de lâcher les rênes, soutenu par ceux qui, à ses côtés, puisent dans les caisses et affichent une opulence insolente. L'armée, rempart du pouvoir, choyée par le régime qui a revalorisé les soldes et reconstruit ses casernes, ne semble pas actuellement abandonner le président en place ni les privilèges multiples qu'il lui assure.

Mais, malgré la répression qui a déjà fait 33 morts depuis le début du mouvement dans les villes, les manifestants continuent d'exiger le retour en prison des notables libérés par Conté, et le départ du dictateur.

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