En 2007 : Mal-logés ou sans-logis, vous aurez droit à des discours.03/01/20072007Journal/medias/journalnumero/images/2007/01/une2005.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Editorial

En 2007 : Mal-logés ou sans-logis, vous aurez droit à des discours.

L'action d'associations comme "Les enfants de Don Quichotte" a fait bouger les choses pour les sans-logis.

Il faut certes du culot de la part de Jacques Chirac pour annoncer, dans son discours de voeux, qu'il veut inscrire "le droit au logement opposable" dans la loi. Cela fait près de douze ans qu'il est au pouvoir et pendant ce temps le nombre de mal-logés et de sans-logis n'a cessé d'augmenter sans que cela fasse bouger le président de la République ! Mais, enfin, au moins en paroles, Chirac reprend une vieille revendication des associations qui militent pour le droit au logement, demandant une loi qui obligerait les pouvoirs publics à assurer un logement à chaque citoyen sous peine de sanctions. Mais les associations sont les premières à exprimer leurs craintes que les choses en restent au slogan car, pour reprendre l'expression du responsable d'Emmaüs, "il ne suffit pas de proclamer pour le faire" .

Des lois qui assurent qu'un logement est un droit, il y en a eu dans le passé. La première du genre date de 1982, il y a un quart de siècle, avec le résultat que l'on sait. On estime aujourd'hui à 100000 le nombre de celles et ceux qui vivent dans la rue. Mais il faut y ajouter près d'un million de personnes qui sont privées de logement personnel et qui sont hébergées par la famille ou des amis, ou vivent dans des foyers, quand ce n'est pas dans des caravanes. Et le nombre de personnes inscrites sur les listes d'attente de logement social avoisine le million et demi.

Le problème n'est pas vraiment nouveau car l'économie capitaliste n'a jamais pu assurer un logement correct à l'intégralité des classes populaires. Mais, depuis quelques années, cet état de choses s'est aggravé. Non seulement le nombre des sans-logis s'accroît sans cesse mais, parmi eux, il y a une proportion croissante de personnes qui ont un travail mais dont le salaire insuffisant ou la précarité de l'emploi font qu'aucun bailleur ne leur loue un logement.

Cela fait plusieurs années, en effet, que la spéculation immobilière fait flamber les loyers au point que des taudis qui ne méritent pas le nom de logements sont loués à des prix inabordables.

Que changera "le droit au logement opposable" promis par Chirac ? Si la mobilisation autour des sans-logis retombe, cela peut n'être qu'une promesse électorale de plus, oubliée aussitôt les élections terminées. Et quand bien même une loi serait votée dans ce sens, contre quelle autorité se retourner pour faire respecter son droit au logement ? Contre l'État ? Contre les municipalités ? Mais il y a déjà une loi qui oblige les municipalités d'une certaine taille à construire 20% de logements sociaux ! Mais il suffit aux municipalités riches, dont Neuilly où Sarkozy a été maire, de payer une modeste amende pour préserver leurs citoyens fortunés de toute mixité avec des pauvres !

L'État pourrait, s'il le voulait, briser la spirale de la spéculation immobilière. Il devrait prendre l'initiative de construire lui-même les centaines de milliers de logements corrects et à loyer accessible qui manquent, sans en passer par les bétonneurs à la Bouygues, c'est-à-dire sans générer du profit privé pour les promoteurs. Et, quant aux terrains dont la rareté et la cherté sont invoquées par tant de municipalités riches, ce n'est pas un problème à condition de prendre les mesures coercitives qui s'imposent pour réquisitionner les terrains nécessaires (comme d'ailleurs les immeubles inhabités du genre de celui occupé depuis peu à Paris par l'association Droit au logement).

Mais, pour cela, il faudrait être prêt à marcher sur quelques privilèges et être capable d'appliquer une mesure en faveur des démunis avec la même détermination et la même célérité que lorsqu'il s'agit de favoriser les riches.

Bien que Ségolène Royal et Nicolas Sarkozy rivalisent pour promettre un logement pour tous, il serait naïf de les croire sur parole.

Arlette LAGUILLER.

Editorial des bulletins d'entreprise du 2 janvier.

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