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Dans les entreprises
Thomé-Génot (Ardennes) : La lutte a payé
À l'issue d'un mois de lutte, les 320 salariés de l'usine Thomé-Génot dans les Ardennes ont réussi à obtenir en grande partie ce qu'ils réclamaient.
Lorsque la liquidation judiciaire avait été prononcée le 24 octobre dernier, la seule perspective qui leur était offerte était d'aller s'inscrire à l'ANPE. Le fonds d'investissements américain Catalina avait pris possession de l'entreprise, avait vidé les caisses, le parc immobilier avait été vendu et Catalina avait tout pris, même l'argent du Comité d'Entreprise traditionnellement destiné aux jouets des enfants du personnel. Pour les travailleurs, il n'était cependant pas question de baisser les bras. Ils exigèrent des pouvoirs publics une prime de 30000 euros chacun, à charge pour ceux-ci de récupérer ultérieurement cette somme en poursuivant Catalina en justice.
Le 21novembre, un mois plus tard, lorsque l'accord a été signé, les salariés obtenaient chacun 10000 euros immédiatement, 10000 euros de plus au bout de six mois, plus 5000 euros s'ils retrouvent un travail.
Durant tout le mois, les licenciés de Thomé se sont manifestés pratiquement chaque jour. Ce furent les actions répétées, notamment devant la préfecture, puis une manifestation réunissant 1500 personnes dans les rues de Charleville le 3novembre. Ce furent, surtout, ces deux jours du 9 et du 10 novembre, lorsque les CRS occupèrent la petite ville de Nouzonville où se situe l'usine, occupation qui avait fait réagir la population qui manifesta malgré les gaz lacrymogènes, exprimant sa solidarité avec les ouvriers que l'on jetait à la rue.
C'est alors que le gouvernement commença à reculer, et proposa une prime de 8000 euros. Les travailleurs de Thomé-Génot n'ayant pas l'intention de s'en contenter, ils restèrent rassemblés autour de la préfecture où avaient lieu les négociations avec la médiatrice envoyée par le gouvernement. Cela eut pour effet de faire monter le contenu de l'enveloppe par paliers, jusqu'aux 20000 euros proposés en définitive, assortis de 5000 euros à ceux qui retrouveraient du travail.
Il reste évidemment des points noirs à cet accord. D'abord l'État s'est défaussé sur les collectivités locales. Il ne paiera que 5000 euros alors que le Conseil Général et le Conseil Régional sont mis à contribution pour 10000 euros chacun par salarié. Par ailleurs la trentaine de salariés de l'usine Thomé-Génot d'Iton dans l'Eure n'ont rien obtenu. Pour toucher la prime il faudra que les salariés signent un contrat de transition professionnelle, formule que le gouvernement expérimente dans quelques zones, parmi lesquelles les Ardennes, mais qui ne concerne pas le département de l'Eure. C'est sous ce prétexte formel que les salariés de l'Eure n'obtiennent rien. On parle d'un «repreneur» pour l'usine d'Iton, mais rien n'est sûr.
La ville de Nouzonville, où il y avait déjà 20% de chômeurs, risque d'être ruinée par la fermeture de l'usine. Au-delà de la prime, c'est l'avenir de toutes ces familles ouvrières qui est préoccupant. Il faudra sans doute encore se battre pour que ce fameux contrat de transition professionnelle se traduise en fin de compte par des emplois réels pour ceux de Thomé.
Malgré cela, ce qui a été obtenu est le fruit de la lutte des travailleurs. Ils ne se sont pas inclinés devant le fait accompli, celui de la faillite décrétée. Ils ont bénéficié d'une large sympathie de la population qui les a aidés à faire reculer ce gouvernement.