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Belgique - Volkswagen-Forest – Bruxelles : 4000 suppressions d’emplois?
Après des semaines de rumeurs, le mardi 21novembre, la direction de Volkswagen annonçait le transfert en Allemagne de la production de la Golf, au détriment de l'usine de Bruxelles-Forest. Cela voulait dire autour de 4000 suppressions d'emplois sur 5400, les autres assemblant la Polo dont les caisses viennent de Slovaquie.
Cela veut dire aussi 6000 à 8000 suppressions d'emplois chez les fournisseurs et les sous-traitants. D'autres licenciements pourraient aussi toucher l'Espagne et le Brésil.
Pendant ce temps-là, l'annonce des restructurations et les transactions entre VW et Porsche, qui vient d'augmenter sa participation à hauteur de 30% du capital de VW, ont fait doubler le cours de l'action VW.
De plus, en octobre, la direction de Volkswagen avait imposé aux ouvriers de ses usines allemandes de travailler quatre heures de plus pour le même salaire, avec l'aval du syndicat IGMetall. Cette mesure faisait suite à la volonté annoncée en 2004 d'augmenter le bénéfice de 8milliards d'ici 2008. Pour les six premiers mois de 2006, le bénéfice net de 1,2milliard d'euros est presque le triple (+194%) de celui du premier semestre 2005!
D'autres mesures étaient en discussion, depuis des licenciements massifs jusqu'à la fermeture complète d'une usine européenne du groupe.
L'inquiétude des travailleurs de Forest
À l'usine de Forest, les débrayages ont commencé le vendredi 17novembre, en fin d'après-midi, quand la presse a révélé que la seule annonce de la réunion du conseil de surveillance de VW en Allemagne concernait le remplacement du PDG. Les salariés de l'usine de Forest ne devaient être informés de leur sort que le mercredi suivant.
Devant ce mépris et «pour savoir», quelques dizaines d'ouvriers de la ligne de montage ont alors débrayé et entraîné les autres. Les autres équipes de nuit et du week-end ont suivi et, à chaque changement d'équipe, les travailleurs restaient une heure ou deux devant l'entrée.
Enfin, mardi21, l'annonce par les médias de 3500 suppressions d'emplois d'ouvriers et 500 d'employés a été un énorme choc. Parmi les quelques centaines de travailleurs présents devant la porte, l'émotion était très forte. Ils avaient consenti tous les sacrifices demandés. Les syndicats avaient accepté la flexibilité... pour sauver l'emploi. La productivité avait été poussée au maximum, les cadences étaient infernales, alors que la moyenne d'âge est supérieure à 42ans. Le coût du travail avait été réduit, par l'acceptation d'augmentations inférieures au coût de la vie. Voilà comment ils étaient remerciés...
Spontanément, des centaines d'ouvriers ont «pris possession de l'usine». Mais sous prétexte de quelques dégradations dans la cantine, qui n'étaient pas le fait des travailleurs à l'initiative de cette action, les responsables syndicaux ont fait fermer toutes les portes et organisé un filtrage à la grille principale, au point que pratiquement plus personne ne pouvait pénétrer et ne devait dépasser le périmètre de l'entrée. Et les dirigeants syndicaux CSC (syndicat chrétien) comme FGTB (socialiste) ne prévoyaient une assemblée générale que pour le lendemain matin.
Plus de 3000 travailleurs ont fait le déplacement ce jour-là, beaucoup comptaient que les syndicats proposeraient des actions. Mais du haut du premier étage du parking, les dirigeants syndicaux se sont contentés de promettre de négocier des primes de licenciement et le maintien du maximum d'emplois à Forest, sans proposer la moindre action et en appelant les travailleurs à rentrer chez eux et à écouter les médias pour avoir des nouvelles...
Ils ont été hués par une forte minorité des travailleurs présents. Mais, sans autre perspective, beaucoup sont repartis. D'autres restaient et, à 300 environ, ils partirent en manifestation à travers la commune.
Depuis, les autorités ont retiré les forces de police qu'elles avaient mises en place à proximité de l'usine depuis le 16 novembre.
Malgré le refus des syndicats d'appeler les travailleurs à réagir, malgré l'absence d'organisation, de 50 à 200 ouvriers se sont retrouvés en permanence devant l'entreprise, à leurs heures de travail habituelles.
La direction ne veut faire part des conditions précises des départs que le 15 décembre et elle a annoncé qu'elle ne paierait les salaires que jusqu'au mardi 28novembre. Des négociations devaient s'engager à partir de ce jour-là, mais la plupart des travailleurs présents sentent bien qu'il faudra tenir et faire sentir leurs exigences à VW, ce qui ne sera pas possible sans actions.
Vendredi 24, des délégués et militants de base ont commencé à prendre quelques initiatives. Une manifestation d'une centaine de militants syndicaux et de travailleurs a rendu visite au concessionnaire VW d'Anderlecht, la commune voisine, où ils ont déposé la carcasse d'une Polo. Ensuite, quelque 150 travailleurs se sont rendus devant Faurecia, l'un des sous-traitants à proximité, où l'occupation est organisée. Des visites chez les autres constructeurs automobiles -Ford à Genk, Opel à Anvers, Volvo à Gand- étaient programmées dans la semaine, pour inviter les travailleurs à apporter leur solidarité à ceux de VW et venir à la manifestation de Bruxelles du 2 décembre, appelée par les syndicats belges et l'IGMetall allemand.
Même s'ils vont participer à ces manifestations, bien des travailleurs sentent qu'elles ne suffiront pas à faire trembler les dirigeants de VW, ni les ministres belges.
Autour du feu qui brûle en permanence devant la porte de l'entreprise, les discussions n'arrêtent pas. Et en effet, devant la carence des directions syndicales dans cette entreprise où la FGTB était encore il y a douze-quinze ans l'un des syndicats en pointe dans le pays, il faudra que les travailleurs organisent leur riposte.