«Portrait social de la France» : L'argent ne fait pas le bonheur des pauvres17/11/20062006Journal/medias/journalnumero/images/2006/11/une1998.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

«Portrait social de la France» : L'argent ne fait pas le bonheur des pauvres

L'Institut national de la statistique et des études économiques (Insee) vient de publier son Portrait social annuel de la France. On peut y lire, dans des tableaux chiffrés certifiés par l'administration publique, ce que chacun peut voir autour de lui, tous les jours: les riches s'enrichissent, la situation des travailleurs se dégrade, l'État agit de moins en moins pour corriger les inégalités sociales.

Par exemple il y a maintenant 12,3% des travailleurs qui ont des contrats temporaires (11,9% l'an passé). En 2005, 17,2% des salariés (contre 16,6% en 2004) travaillaient à temps partiel et au moins un tiers d'entre eux, soit 750000 personnes, disaient ne pas gagner assez et cherchaient un autre emploi ou d'autres heures de travail.

L'Insee commente élégamment l'évolution comparée des revenus du travail et de la propriété: «Les revenus d'activité ralentissent, ceux du patrimoine restent dynamiques.» Autrement dit, on gagne moins lorsqu'on est aux manivelles et plus quand on encaisse des dividendes. Le total des salaires et traitements s'établit à 660 milliards d'euros et augmente moins que l'inflation. Le total des revenus de la propriété (dividendes, loyers, rentes, etc.) se monte à 260 milliards d'euros et augmente lui plus vite que celle-ci.

Les chiffres du chômage sont ceux que donne le gouvernement ou, plus exactement, l'Insee calcule le nombre de chômeurs suivant les critères fixés par les gouvernements. Malgré tout, constatant qu'en 2005 le nombre d'allocataires du RMI a augmenté de 51000, pour atteindre 1 290000, l'institut ajoute: «Cette évolution s'explique essentiellement par le fait que les demandeurs d'emploi sont moins fréquemment indemnisés par le régime d'assurance chômage et recourent donc plus souvent au RMI.» Là aussi, c'est décrire élégamment une réalité catastrophique.

Car ce «portrait de groupe», au-delà des tableaux mathématiques et des commentaires convenus, est tout de même celui de femmes et d'hommes en chair et en os. Sous la rubrique «travail à temps partiel non désiré» on peut imaginer la caissière de son supermarché, sous celle «sorti de l'école sans diplôme» le gosse qui joue dans la cour, et sous celle «dividende des actions» le visage d'Arnaud Lagardère. Le tableau devient alors beaucoup plus expressif et c'est celui d'une société minée par l'exploitation et l'injustice.

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