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- Lutte ouvrière n°1996
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Dans les entreprises
Rhodia Silicones - Saint-Fons (69) : Usines vendues et revendues, les travailleurs veulent des garanties.
Dans la chimie, les réorganisations continuent, avec les éventuelles pertes d'emplois qui peuvent en découler. Rhodia s'est fait de la publicité en participant au Forum pour une mondialisation responsable, qui vient de se tenir à Lyon, et en envoyant le patron du groupe, Jean-Pierre Clamadieu, en voyage en Chine avec Chirac et d'autres patrons du CAC40. Mais, si on a beaucoup parlé de la signature de nouveaux contrats, les médias ont été plus discrets sur les réorganisations industrielles en cours.
Ainsi à Saint-Fons, près de Lyon, le groupe Huntsman vient d'annoncer la fermeture fin 2008 de l'usine Ciba qu'il avait achetée au mois de juin, ce qui entraînera aussi le déménagement du siège social France: ce seront près de 300 emplois en moins.
Les entreprises textiles européennes du groupe Rhodia (1200 salariés en Europe) devraient être vendues à Butler Capital Partners, un groupe financier connu dans le monde des affaires pour acheter, réorganiser, revendre des usines et des groupes industriels en empochant à la fin un coquet profit.
Concernant les usines chimiques de Rhodia Silicones, des informations circulaient depuis des mois sur une éventuelle alliance (joint-venture) avec Blue Star, un groupe industriel chinois. Début octobre, les travailleurs du secteur Silicones ont appris par la CGT les manoeuvres entamées par leurs dirigeants pour vendre totalement ce secteur à Blue Star. Ces travailleurs sont au nombre de 780 sur les trois sites français: Saint-Fons (Rhône), Roussillon et Les Roches de Condrieu (Isère), et 169 dans d'autres pays d'Europe.
Ce secteur, qui contribue pour 16% au chiffre d'affaires de Rhodia, a vu son propre chiffre d'affaires atteindre 447 millions d'euros en 2005, contre 408 millions attendus par le groupe. Il a dégagé un excédent brut d'exploitation supérieur à 12% du chiffre d'affaires: il s'agit donc d'une activité très rentable pour les actionnaires de Rhodia.
Depuis que Rhône-Poulenc, lors de la création d'Aventis entre 1989 et 2002, s'est séparé de sa chimie, devenue Rhodia, ce dernier annonce des pertes à répétition. Son endettement est de plus de 3 milliards d'euros et, pour satisfaire les banques, d'une part il vend une partie de ses activités (celles dont il affirme qu'elles ne lui permettent pas d'être dans les trois premiers mondiaux de ces branches); et d'autre part il met en oeuvre une politique de "réduction des coûts". Les dirigeants de Rhodia veulent retrouver rapidement une situation où les profits dégagés, et donc les dividendes versés aux actionnaires, ne soient pas aléatoires.
Ce sont les salariés qui font les frais de cette politique. Sur les trois années 2003, 2004 et 2005, le nombre de salariés du groupe a diminué de 3 819, alors que le chiffre d'affaires engendré par leur travail a beaucoup moins diminué. Dans les usines restées Rhodia, les travailleurs, qui sont de moins en moins nombreux, voient leurs conditions de travail se dégrader et leurs rémunérations stagner, contrairement à celles des hauts dirigeants. Pour ce qui concerne la division Silcea (dont les Silicones forment les deux tiers), son excédent brut d'exploitation est passé de 62 millions d'euros en 2004 à 102 millions en 2005. Et une bonne partie de ce "plus" vient des réductions de coûts et des gains de productivité.
Il n'est donc pas étonnant que le sentiment dominant des travailleurs des Silicones, face à l'annonce de ces manoeuvres, soit une grande méfiance. Pour les salariés, se voir traités comme les murs et les installations leur montre l'estime que les patrons ont pour ceux qui ont fait toute leur richesse. Si cela ne surprend personne, ça ne passe quand même pas. Les dirigeants de Rhodia et de Blue Star parlent bien de maintenir les effectifs et les avantages acquis individuels. Mais les travailleurs d'autres secteurs de ce groupe ont fait des expériences amères du "maintien" à la sauce patronale.
Mardi 23 octobre, ce sont près de 300 salariés des usines de Rhodia de Saint-Fons qui se sont retrouvés dans la grande salle du comité d'entreprise pour interpeller la direction. Celle-ci a dû entendre la défiance des salariés à son encontre, des salariés ont dénoncé les ventes d'usines les unes après les autres pour engraisser les banques et les actionnaires, elle a entendu des travailleurs qui depuis des générations travaillent dans la chimie, ont toujours connu Rhône-Poulenc puis Rhodia et se demandent ce que vont devenir les usines chimiques dans la région. Mais ce qui a été clair pour tous, c'est qu'il faudra se battre pour la défense des acquis collectifs.