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- Lutte ouvrière n°1995
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Leur société
Ce que les patrons attendent des juges.
Faire "dialoguer" la justice avec l'entreprise, tel était le but affiché de la réunion organisée le 20 octobre par une commission du Medef avec 300 futurs magistrats issus de la promotion 2006 de l'École nationale de la magistrature. Dialogue est beaucoup dire, car ce fut avant tout pour les patrons présents l'occasion d'exprimer ce qu'ils attendaient des juges. Quant aux travailleurs, qui font fonctionner leurs entreprises, ils n'avaient évidemment pas été invités.
Ces patrons qui, apparemment, ne se considèrent pas comme des citoyens ordinaires, sont donc allés droit au but pour indiquer aux magistrats quelle devrait être leur attitude envers eux. Ils ont commencé par se plaindre d'avoir été malmenés par la justice, qui appliquerait les textes de façon trop rigoureuse à leur encontre, sans tenir compte "du contexte et de l'histoire de l'entreprise", déplorait l'un d'eux. D'autres critiquaient la longueur des procédures de licenciement, sous-entendant que la justice ferait trop d'embarras lorsqu'ils veulent jeter des salariés à la porte. Henri de Castries, le PDG du groupe AXA à qui il avait été reproché de ne pas appliquer une décision judiciaire concernant l'indemnisation de victimes, s'est aussi apitoyé sur le sort de ces pauvres patrons incompris: "On aimerait un peu plus d'écoute", s'est-il plaint, demandant aux magistrats de ne pas "oublier l'étincelle d'humanité au quotidien"... cette humanité qu'il ne manque sans doute pas de manifester chaque jour à ses salariés!
Bref, il semble intolérable à ces représentants du patronat de droit divin que les juges veuillent appliquer des lois qui les contraignent un tant soit peu.