Chirac, Pinault et la privatisation de GDF : On n’est jamais trahi que par les siens18/10/20062006Journal/medias/journalnumero/images/2006/10/une1994.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Chirac, Pinault et la privatisation de GDF : On n’est jamais trahi que par les siens

Alors que le gouvernement préparait le rachat de Gaz de France par le groupe Suez, en faisant voter par les députés la privatisation de GDF, on apprenait que le milliardaire François Pinault préparait en sous-main le rachat du même groupe Suez. En collaboration avec le groupe italien Enel, Pinault risquait de faire capoter le bel édifice conçu par Villepin.

Ce rapprochement Suez-Gaz de France avait justement été conçu au départ pour faire face aux appétits du groupe Enel. Celui-ci, qui n'est autre que l'ancienne compagnie nationale d'électricité italienne, équivalant à EDF, aujourd'hui privatisée, avait annoncé une OPA hostile sur Suez, il y a moins d'un an. À l'époque le groupe italien, présent essentiellement dans l'énergie, cherchait un partenaire financier de poids pour se partager la proie: pour l'Italien, l'énergie et les centrales nucléaires de Belgique (Tractebel); pour le partenaire, le pôle environnement et services à l'énergie. Suez n'étant pas de taille à résister à l'OPA hostile du groupe italien, le gouvernement français est venu à son secours. Il a annoncé le projet de fusion de Gaz de France avec Suez, ce qui revenait à livrer l'entreprise étatisée au groupe privé.

Chirac a plaidé pour ce projet, Villepin a dû se démener auprès de sa majorité qui rechignait. Il l'a fait rentrer dans le rang. Même Sarkozy a dû manger son chapeau, lui qui avait promis-juré, et même écrit, que Gaz de France ne serait pas privatisé.

Tout semblait donc aller pour le mieux pour le tandem Chirac-Villepin.

Mais voilà que le journal Les Échos, puis le Financial Times ont révélé que le milliardaire en euros François Pinault était prêt à s'allier à Enel pour acquérir ensemble Suez, puis pour le dépecer. Loin d'être démentie par les deux acheteurs supposés, cette opération a été simplement déclarée dépassée.

Enel, la société italienne, a en effet précisé: «Concernant les articles de presse sur un accord entre Enel et Artémis publiés (...) par Les Echos et le Financial Times, Enel déclare qu'il s'agit de l'une des hypothèses envisagées dans le passé qui n'est plus valide aujourd'hui».

Du coup, François Pinault et sa holding privée ont dû, pour le moment, passer au point mort: «Artémis a été approchée par Enel pour l'acquisition des pôles environnement et services à l'énergie de Suez, dans l'éventualité d'une offre publique d'achat initiée et réussie par Enel. À ce jour, compte tenu des déclarations récentes d'Enel, ce projet n'est plus d'actualité.»

Ce qui peut vouloir dire que, demain, il le redeviendra. Mais, cet épisode le prouve une nouvelle fois, les milliardaires comme Pinault se moquent totalement des décisions des hommes politiques, même s'ils s'appellent Chirac. Même quand il s'agit, paraît-il, d'amis proches, comme dans ce cas précis, car chez ces gens-là l'amitié ne pèse pas très lourd, quand il s'agit de milliards à gagner.

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