Procès du naufragede l’An Oriant : La mer est moins dangereuse que l’armateur.04/10/20062006Journal/medias/journalnumero/images/2006/10/une1992.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Procès du naufragede l’An Oriant : La mer est moins dangereuse que l’armateur.

Le premier octobre 2000, au large de l'Irlande, le chalutier lorientais An Oriant, couché par une lame, coulait en quelques minutes. Sur les onze hommes d'équipage seuls trois purent être sauvés. Le procès intenté par les familles au capitaine, un des trois survivants, et surtout aux armateurs s'est ouvert lundi 2 octobre.

L'An Oriant faisait partie de la flotte d'Intermarché, le premier armement de pêche du pays. C'était un navire de 38,50 mètres, déjà âgé de 24 ans au moment du naufrage (l'administration considère qu'un bateau de pêche est vieux à 20 ans). Le chalutier avait subi des transformations pour lui permettre de pratiquer la pêche industrielle, c'est-à-dire de travailler le poisson dans la cale.

Il semble que les nouvelles machines réfrigérantes et les appareils de conditionnement du poisson aient modifié la stabilité du bateau. Un capitaine, témoin au procès, affirme que le bateau «gîtait toujours sur tribord» (était toujours penché à droite) et «était dangereux quand on virait vent arrière». Il dit même que l'An Oriant était un «faiseur de veuves». En tout cas, l'An Oriant était parti pour l'Irlande sans permis de naviguer et avec un capitaine qui ne connaissait le bateau que depuis deux jours.

Les conditions météo étaient très mauvaises, mais l'An Oriant a continué à pêcher au lieu de se mettre en sécurité. Une vague l'a pris alors qu'il remontait son chalut et que la porte donnant sur la salle où on travaille le poisson était ouverte.

Depuis six ans, Intermarché a mis au point une nouvelle forme de pêche: la base avancée. Le bateau ne rentre plus au port, il est ravitaillé et déchargé de sa pêche toutes les semaines et peut rester en mer 346 jours par an. La machine est rentabilisée au maximum, l'entretien, la révision, la sécurité sont réduits au minimum. Les équipages sont relevés par tiers toutes les semaines, passant ainsi deux semaines en mer à travailler quasiment sans limite avec une semaine à terre.

Les vieux bateaux du type An Oriant qu'Intermarché avaient rachetés et modifiés en 1995 ont continué à naviguer jusqu'à cette année. Non seulement les pouvoirs publics n'ont demandé aucun compte à l'armateur pour ces bâtiments mais ils lui ont versé une prime à la casse.

Pourquoi les marins vont-ils en mer? «C'est pour engraisser l'armateur» répond une vieille chanson.

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