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Leur société
Ségolène Royal et l’immigration : Contre la politique de Sarkozy...tout contre
Il se passe peu de jours sans que la candidate à la candidature du PS ne livre quelque réflexion sur l'immigration. Campagne électorale oblige, sans doute, Ségolène Royal semble se dépêcher de se démarquer de certains aspects de la politique sarkozyste en la matière, pour mieux brouiller les cartes sur le fond.
Si elle a, récemment, critiqué le ministre de l'Intérieur, c'est eu égard aux «résultats» -le terme en dit long- du mouvement de régularisations entrepris par les services de l'État: il y aurait de la triche, et même un «mensonge public», dans la trop grande adéquation entre le nombre prévu et le nombre réalisé des dossiers de familles «régularisées». «C'est une mauvaise action, a déclaré Ségolène Royal sur la chaîne LCI, ce n'est pas crédible». Loin d'elle cependant l'intention de qualifier de «mauvaise action» l'attitude du gouvernement qui laisse des milliers de travailleurs immigrés vivre l'angoisse de la clandestinité et l'exploitation qui va de pair!
Car, sur le plan de l'immigration comme sur d'autres, Ségolène Royal ratisse large. Après s'être prononcée contre les «régularisations massives», en Espagne et en Italie déjà, où elles ne seraient qu'un «héritage des années Aznar et Berlusconi», autrement dit la faute des gouvernements de droite, elle a élaboré un concept de «droit moderne à l'aller et au retour». Cette sorte de visa saisonnier permettrait, selon la présidente de Poitou-Charentes, de gérer au plus près les besoins temporaires de main-d'oeuvre, qu'il s'agisse, dit-elle, de chercheurs, d'universitaires ou de travailleurs du bâtiment ou de l'agriculture. Ces derniers ne seraient «plus tentés de rester» s'il n'y a plus d'activité et pourraient retourner en vacances dans leur pays. S'ils sont au chômage et que les patrons, après les avoir pressés, les jettent, comme de nombreux emplois temporaires les y autorisent, les travailleurs doublement saisonniers n'auraient plus qu'à aller se faire nourrir ailleurs. Comme si c'était seulement à cause d'un manque de «sécurité» dans la possibilité de revenir que de nombreux travailleurs émigrés se privaient de retourner au pays! Le prix du voyage à lui seul constitue un handicap pour un petit salaire, sans parler des conditions de vie dans le pays d'origine.
Mais, plus choquant encore, cette nouvelle invention permet à la candidate de se montrer opposée, désormais, au regroupement familial puisque, sûrs de pouvoir «retourner chez eux avec l'assurance que l'année suivante, ils pourront retourner en France», les travailleurs émigrés temporaires seraient censés ne pas avoir besoin de faire venir leur famille. La bise aux enfants deux fois l'an, n'est-ce pas suffisant?
L'image réactionnaire n'étant sans doute pas jugée assez convaincante, Ségolène Royal lance encore quelques pierres dans le jardin de Sarkozy. Il faut «respecter les étrangers qui sont ici en situation régulière» (et les autres?), «ne pas faire l'amalgame entre tous les étrangers en France» (est-ce, par exemple, entre les milliardaires installés sur la Côte-d'Azur et les familles entassées chez les marchands de sommeil?) Le ministre de l'Intérieur se voit presque reprocher de ne pas «appliquer les décisions de justice», puisqu'il ne faut pas «les annoncer et ensuite, ne pas passer à l'action».
Et, flèche du Parthe, pour couronner le tout, la «loi Sarkozy 2006 n'est [même] pas appliquée, faute de décret d'application».
Avec le programme de Ségolène Royal, la main-d'oeuvre, qualifiée ou non, qui continuera d'arriver dans le pays, fuyant le chômage, la misère ou la dictature, sera toujours soumise à des lois de plus en plus arbitraires, et servie aux patrons sur un plateau... de précarité.