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Editorial
Sarkozy et les retraites : Il nous avertit des coups qu’il nous prépare
Sarkozy persiste et signe. Reprenant la proposition de son compère Fillon, il a annoncé qu'il a l'intention de s'en prendre aux quelques catégories de salariés dont les retraites n'ont pas été affectées par les lois Balladur puis Raffarin: cheminots, employés de La Poste, agents de la RATP, travailleurs d'EDF et de GDF, notamment. Villepin puis Chirac ont tenté de mettre un bémol aux déclarations de Sarkozy. Mais Sarkozy dit tout haut ce que le patronat souhaite et que la droite se prépare à faire. Leurs discussions ne portent que sur l'opportunité d'annoncer en période électorale les attaques programmées.
Depuis plus de dix ans, les gouvernements mènent la guerre contre les retraités d'aujourd'hui et de demain, c'est-à-dire contre tous les salariés. Balladur avait commencé en 1993, en faisant passer le nombre d'années de cotisation de 37 ans et demi à 40 ans pour les travailleurs du privé, repoussant par là même l'âge de la retraite pour beaucoup, et en diminuant les pensions, notamment par le changement de la base de calcul, passant des dix aux vingt-cinq meilleures années de salaire.
En 1995, Juppé reprit les attaques contre les salariés du secteur public. Il dut reculer et remballer son projet devant les grèves.
Pendant ses cinq ans de gouvernement, Jospin n'est pas revenu sur les mesures Balladur. La droite revenue au pouvoir, Raffarin a pu continuer le sale travail en s'attaquant aux retraites des salariés du public.
À chaque attaque, les gouvernements prétendent que c'est une nécessité, car le nombre des retraités s'accroît par rapport à celui des actifs. C'est une fumisterie. Jamais ces gens-là ne parlent de l'accroissement de la productivité. Ceux qui travaillent sur les chaînes des usines d'automobiles savent que, d'année en année, on produit de plus en plus de voitures avec de moins en moins d'ouvriers. Il n'y aurait pas de problème des retraites si la productivité du travail était mieux répartie: moins pour les actionnaires, plus pour les travailleurs.
Au moment même où, relayant les déclarations de Sarkozy et de Fillon, une partie de la presse a mené campagne pour présenter les cheminots ou les postiers comme des privilégiés, les quarante principales entreprises du pays ont fait état d'une augmentation record de leurs bénéfices. Rien qu'une fraction de ces sommes pourrait assurer une retraite correcte à tous.
Mais, pour ceux qui nous gouvernent, il n'est pas question de toucher aux privilèges, réels ceux-là, des actionnaires dont les revenus augmentent de 20% à 30% par an, sans rien faire, sans être utiles à la société. C'est sur leurs dividendes qu'il faudrait prélever ce qui manque sur les retraites de ces salariés qui les font vivre et s'enrichir.
Ne nous y trompons pas: dans les attaques de Sarkozy, il ne s'agit pas seulement de la retraite des cheminots ou des salariés d'EDF et GDF. Chaque attaque en annonce de nouvelles. Jusqu'où vont-ils repousser l'âge de la retraite? Jusqu'où vont-ils réduire les pensions? Jusqu'à ce que, pour une grande partie des salariés, il ne reste plus que cette alternative: crever au travail avant de pouvoir prendre sa retraite, ou crever de misère une fois retraité.
Lorsque Raffarin s'est attaqué aux retraites du service public, il a eu le cynisme de présenter son projet comme un acte de justice, pour égaliser la situation des salariés du privé et du public. Sarkozy ressort le même couplet aujourd'hui.
Il y a pourtant une autre façon d'assurer cette justice: annuler les mesures Balladur et Raffarin et revenir aux 37 ans et demi de durée maximum de cotisation, et assurer une pension correcte à tous les retraités.
Mais pour cela, il ne faudra compter sur aucun gouvernement. Cela ne pourra qu'être imposé par les salariés, qui ne pourront indéfiniment supporter les coups qu'on leur porte.
Arlette LAGUILLER
Éditorial des bulletins d'entreprise du 18 septembre