- Accueil
- Lutte ouvrière n°1990
- L’Oréal : Le profit... sans fard
Dans les entreprises
L’Oréal : Le profit... sans fard
L'Oréal a annoncé une progression de 21,9% de ses dividendes pour le premier semestre 2006. Voilà donc la famille Bettencourt et les actionnaires du groupe rassurés: la retraite d'Owen-Jones du poste de PDG n'a pas tué la poule aux oeufs d'or.
L'ancien patron de L'Oréal a été présenté comme une sorte de demi-dieu des affaires par ses pairs et par la presse économique. En réalité, ce sont surtout les revenus que lui versait L'Oréal depuis des années qui en faisaient une exception dans le club des patrons millionnaires: encore en 2005, il était le patron le mieux payé de France avec 6,5 millions d'euros de salaire direct et plus de 16 millions de stock-options.
L'Oréal fait comme tous les géants industriels...
Pour le reste, Owen-Jones n'a pas inventé la poudre... même pas la poudre pour le nez. Les profits colossaux annoncés chaque année par le groupe sont basés sur des recettes qu'utilisent tous les géants de l'industrie, en particulier ceux liés à la grande distribution ou aux marchés du luxe.
Tout d'abord, grâce aux milliards accumulés -son chiffre d'affaires passant de 7 à 14 milliards d'euros dans les dix dernières années-, L'Oréal possède un éventail de plus en plus large de produits. C'est bien simple, on peut aujourd'hui se laver de la tête au pied, se raser, se parfumer avec des produits de L'Oréal sans même le savoir: Ultra Doux, Garnier, Dop, Gemey-Maybelline, Narta, Mixa, Mennen, etc., tout cela c'est la famille Bettencourt qui lave et rase, mais pas gratis! Aux gammes de produits grand public, le groupe a ajouté des marques de prestige, s'ouvrant le marché du luxe: Giorgio Armani, Ralph Lauren, Biotherm, Cacharel, Lancôme...
Ainsi, tout comme Danone et Nestlé dans la filière agroalimentaire par exemple, L'Oréal a fait son beurre en mettant la main sur une bonne partie des marques de cosmétiques et de produits d'hygiène vendus aujourd'hui à l'échelle du monde.
D'autre part, L'Oréal annonce régulièrement le rachat d'entreprises, ainsi dernièrement la chaîne de distribution de produits de beauté The Body Shop, ou son entrée dans le capital d'autres. L'Oréal est actionnaire de Sanofi-Aventis et a des liens financiers étroits avec le groupe Nestlé. Dans les deux dernières années, la direction a utilisé un procédé imitant d'autres géants de l'industrie pour soutenir le cours des actions: L'Oréal a racheté pour 2,5 milliards d'euros de ses propres actions pour les détruire, ce qui équivaut à près de... 19000 euros par mois et sur une année pour tous les salariés du groupe en France!
...y compris d'exploiter les salariés!
Chez L'Oréal comme dans toutes les entreprises capitalistes, c'est tout pour l'actionnaire et rien ou pas grand-chose pour les salariés. Les recettes imposées aux salariés du groupe par la direction, sous Owen-Jones ou son successeur, sont celles qui sont imposées à tous les travailleurs. L'Oréal n'a rien inventé pour nous faire suer du profit qui ne soit mis en pratique dans toutes les entreprises actuellement.
Tout d'abord, il n'y a pas eu d'augmentation générale des salaires depuis deux ans; les années précédentes, elles étaient voisines de 1%, voire moins en moyenne sur l'année. La direction a d'ailleurs annoncé qu'il n'y aurait plus désormais d'augmentation générale des salaires; elle veut imposer le salaire au mérite.
Bien sûr, elle prétend que notre «rémunération globale annuelle» augmente grâce à la prime d'intéressement. Tout d'abord, la plupart des salariés préfèrent la laisser bloquée pour ne pas payer d'impôt, si bien que l'argent reste pendant au moins cinq ans dans les caisses de L'Oréal; de plus, quand on additionne les augmentations personnelles à la prime d'intéressement, il ressort que la rémunération «brute», comme l'appelle la direction, a augmenté en moyenne de 3% pour les cadres, 2% pour les agents de maîtrise et 1,6% pour les employés, ce dernier chiffre étant plus bas que le taux de l'inflation donné par la direction pour 2005. La prime d'intéressement est depuis peu indexée sur l'absentéisme pour maladie, ce qui revient à faire pression pour que les salariés viennent coûte que coûte au travail.
Dans le même temps, la rémunération des dix plus hauts cadres du groupe a été augmentée de 15,25%; il y a de quoi voir rouge, quand on entend la direction prêcher le blocage des salaires et quand on sait qu'en dix ans le dividende net par action a été multiplié par cinq.
Par ailleurs, L'Oréal n'embauche qu'au compte-gouttes dans les centres de recherche, pour une charge de travail qui permettrait de créer bien des emplois, alors que dans les usines les effectifs diminuent dans toute la France. Un plan d'accompagnement au départ anticipé à la retraite est proposé depuis deux ans aux travailleurs volontaires, sans perspective de les remplacer; la direction espère supprimer ainsi 500 emplois. Déjà une centaine d'emplois ont été supprimés sur plusieurs sites.
Derrière les paillettes des stars qui font la publicité pour les produits L'Oréal, derrière les beaux discours des dirigeants -Owen-Jones excellait dans ce domaine- sur l'attachement du groupe à l'esthétique et à... la promotion des femmes, il y a avant tout la recherche du profit maximum, et les premiers à payer, avant le consommateur, ce sont tous les salariés du groupe.