Sûreté aérienne : Par ici la monnaie...14/09/20062006Journal/medias/journalnumero/images/2006/09/une1989.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Sûreté aérienne : Par ici la monnaie...

À l'occasion du 5e anniversaire des attentats du 11 septembre 2001 aux États-Unis, la presse écrite et audio-visuelle a dressé l'inventaire des mesures de contrôle, renforcées depuis lors, dans les aéroports et les avions. Il a aussi été beaucoup question du coût, qui a doublé en cinq ans, de ce qu'on appelle la "sûreté aérienne"... les compagnies aériennes en profitant pour demander aux États de mettre à nouveau la main à la poche, alors qu'elles présentent déjà l'addition aux passagers.

Pour ceux-ci, outre un surcoût par billet de l'ordre de 9 euros, l'aspect le plus visible du renforcement de la sûreté aérienne, ce sont des files et des temps d'attente rallongés avant d'embarquer. Cela résulte de contrôles accrus aux "PIF" (poste d'inspection filtrage); de vérifications d'identité redoublées; du contrôle systématique des bagages placés en soute, de celui plus fréquent des bagages à main; de la fouille individuelle qui suit souvent le passage obligatoire aux portiques de détection... Il y a aussi la présence visible de patrouilles armées dans les aéroports, qui, en France, restent soumis au plan Vigipirate.

Pour les équipages et les salariés des sociétés opérant sur les plate-formes aéroportuaires, les contrôles en tout genre ont été renforcés au sol comme en vol. Cela peut même aboutir au licenciement de personnes travaillant dans des "zones réservées" ou assurant des fonctions de sécurité, quand, pour une raison ou une autre, la préfecture rejette leur demande d'habilitation (en 2005, à Roissy-CDG, cela a frappé 5,4% des 65643 salariés ayant présenté un tel dossier).

Bien sûr, ce que mettent en avant les gestionnaires des aéroports, tel ADP (Aéroports de Paris), et les compagnies aériennes, c'est que ces mesures sont indispensables à la sécurité de tous, et que pour cela ils déploient tous les moyens matériels et humains nécessaires.

"Aéroports de Paris: 300 millions d'euros investis" dans la sûreté, titrait Le Parisien du 11 septembre. Si cela correspond au coût de deux Airbus, ADP et les compagnies "oublient" généralement de préciser sur qui et sur quoi repose, dans les faits, la protection des passagers.

Depuis des années, en France comme dans toute l'Union européenne, les États sous-traitent cette fonction aux aéroports, lesquels la sous-traitent à leur tour. Au bout de la chaîne, les sociétés qui ont la charge de la sûreté aérienne sont souvent des filiales, voire les filiales de filiales, de grands groupes financiers ou de transport (Brink's, Securitas, Air France, etc.). Comme les autres sous-traitants, qui emploient environ 80% des 85000 salariés de Roissy, les entreprises de sûreté imposent des horaires à rallonge, des sous-effectifs et des salaires voisins du smic à leurs salariés, généralement employés en contrats précaires. Et cet été, à Roissy et à Orly, on les a vus manifester et faire grève pour leurs droits et leur dignité.

Autant dire que les "surcoûts sûreté" invoqués par les compagnies et les aéroports peuvent même rapporter gros à ces entreprises sous-traitantes, voire aux compagnies et aux aéroports quand ils en sont actionnaires. Et ce marché, en pleine expansion, est des plus appétissants pour ces groupes et leurs filiales quand on sait qu'en 2002, dans les quinze pays de l'Union européenne d'alors, trois milliards d'euros ont été consacrés à la sûreté aérienne!

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