Trafic de médicaments : Parce que les capitalistes se soignent07/07/20062006Journal/medias/journalnumero/images/2006/07/une1979.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Trafic de médicaments : Parce que les capitalistes se soignent

Le journal Le Monde du mardi 4 juillet consacre une page entière à la contrefaçon, devenue un véritable «commerce mondial parallèle», 100 millions d'objets ayant été saisis en 2005 dans l'Union européenne, du faux sac à la pièce détachée automobile. Mais les contrefaçons ne concernent pas que les sacs Vuitton ou les chemises Lacoste, il y a aussi un marché des médicaments contrefaits dont la journaliste du Monde dénonce les conséquences dramatiques.

Ces médicaments représenteraient plus de 10% de l'ensemble des produits pharmaceutiques vendus sur la planète. Certains sont, si on peut dire, de véritables contrefaçons, puisqu'ils contiennent le même principe actif que le produit original. Sauf qu'il est parfois présent en trop faible quantité, et donc moins efficace, voire carrément dangereux quand il s'agit par exemple d'un antibiotique dont la posologie doit être rigoureuse. Certains sont des placebos sans aucune efficacité. Mais il y aussi de véritables poisons, comme ce sirop contre la toux qui contenait de l'antigel et fit quatre-vingt-neuf morts en Haïti, en 1995, et trente en Inde en 1998.

Les pays africains sont les plus touchés par ce commerce de mort, puisque 80% des médicaments contrefaits y sont acheminés, depuis des laboratoires clandestins situés principalement en Asie. La journaliste cite l'exemple du Cameroun, où 40% des traitements antipaludéens ne sont pas fiables. Les pays européens ne sont pas pour autant à l'abri, puisque de nombreux médicaments sont proposés sur Internet sans aucune garantie quant à leur efficacité.

Mais ce commerce parallèle frappe essentiellement les pays où la population n'a pas accès à des médicaments trop chers pour elle, les pays africains mais aussi la Russie, où s'est développé un marché noir médical. Les premiers responsables sont bien sûr les escrocs capables de mettre de l'antigel dans un médicament et d'en faire commerce, mais s'ils ont pu prendre 10% du marché pharmaceutique mondial, c'est aussi lié à la politique des grands trusts de l'industrie pharmaceutique. Car si des gens achètent des médicaments contrefaits au péril de leur vie, c'est parce que les médicaments fabriqués par l'industrie pharmaceutique sont hors de prix. Et si l'industrie pharmaceutique se refuse à baisser ses prix, c'est parce que les populations des pays pauvres ne sont pas solvables et ne représentent pas un marché «intéressant» pour elle.

En effet, pour celle-ci, un médicament c'est d'abord une source de profits, et pour défendre ceux-ci, on a vu les trusts pharmaceutiques se battre et obtenir depuis le 1er janvier 2005 l'interdiction pour les pays du Tiers Monde de fabriquer des génériques de médicaments, anti-sida par exemple, à des coûts de cinq à dix fois moindres que les molécules d'origine. Aujourd'hui encore, onze millions de personnes meurent chaque année de maladies infectieuses comme la tuberculose, le paludisme, alors qu'il existe des traitements efficaces auxquels elles ne peuvent accéder.

Alors les milliards accumulés par les actionnaires d'une industrie pharmaceutique avec ses médicaments modernes, efficaces... mais chers, et les médicaments contrefaits pour les pauvres du Tiers Monde sont finalement deux aspects d'une même course au profit, sur le dos des malades.

Partager