Réunion de l'OMC à Genève : La foire d'empoigne du commerce mondial07/07/20062006Journal/medias/journalnumero/images/2006/07/une1979.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Réunion de l'OMC à Genève : La foire d'empoigne du commerce mondial

Les États membres de l'OMC, l'Organisation mondiale du commerce, doivent se réunir à Genève afin de tenter d'accoucher d'un accord, avec semble-t-il fort peu de chances d'y parvenir. Depuis cinq ans en effet qu'ont commencé les négociations dites du «cycle de Doha», les points de divergence se sont accumulés, et les échéances arrivent à présent à leur terme sans qu'un compromis soit en vue.

Sur la seule question du secteur agricole, le document de travail de la réunion de Genève ne comprend pas moins de 760 points encore en litige... et le secteur agricole est loin d'être le seul à poser problème.

L'OMC est l'avatar récent du GATT, un organisme international né après la Seconde Guerre mondiale afin de lutter contre le protectionnisme et pour abaisser les entraves au commerce, en particulier les barrières douanières. Sur le papier glacé des proclamations officielles, l'OMC, comme son prédécesseur, a pour rôle de promouvoir le libre-échange, la croissance économique et le bonheur des peuples. La réalité capitaliste est évidemment un peu plus terne.

Des règles justes et équilibrées dans un commerce mondial dominé par la concurrence et l'anarchie capitaliste, cela n'existe pas. Il s'agit de fixer le cadre au sein duquel s'affrontent les multinationales qui ont ceci en commun qu'elles cherchent à en ruiner d'autres, à plumer les salariés et les petits producteurs. Aussi, depuis qu'elle existe, l'OMC est-elle le lieu de perpétuels affrontements entre puissances capitalistes, chaque État luttant de son mieux pour promouvoir les réglementations favorisant sa propre bourgeoisie. Chaque accord, appelé «cycle», fait donc l'objet de laborieuses négociations s'étalant sur plusieurs années, et dont l'issue doit beaucoup moins à un idéal de justice et de paix, ou même de liberté commerciale, qu'aux égoïsmes nationaux, aux coups tordus et aux rapports de force.

Les principales tensions opposent les pays impérialistes à ceux du Tiers Monde, à propos des barrières que ces derniers tentent de maintenir pour protéger leurs producteurs face à l'importation des produits industriels. Mais elles opposent aussi les pays riches entre eux, en particulier l'Europe et les États-Unis, notamment sur les droits de douane concernant les produits agricoles et sur les subventions versées directement aux agriculteurs.

Beaucoup de ceux qui critiquent les ravages des lois du marché désignent l'OMC comme la responsable et se réjouissent de ses échecs. Pourtant, que les États les plus puissants parviennent à imposer leur loi de manière uniforme sur la planète via l'OMC, ou que leurs rivalités les en empêchent, cela ne change pas grand-chose, ni pour les États plus faibles, ni pour les peuples. Face aux blocages qui, depuis une quinzaine d'années, ont paralysé les négociations globales au sein de l'OMC, les États impérialistes ont réagi par la multiplication d'accords dits bilatéraux, c'est-à-dire conclus en tête-à-tête, dont on peut difficilement prétendre qu'ils constituent un moindre mal pour les plus faibles. Quarante pour cent du commerce mondial s'effectuent désormais dans le cadre de tels accords, et cette proportion ne cesse d'augmenter.

Comme l'avoue un responsable des Nations Unies, les pays pauvres «n'ont pas vraiment le choix; la course aux accords bilatéraux est devenue une guerre des gangs à laquelle il faut participer, sauf à prendre le risque de voir les flux d'échanges passer chez le voisin». Une guerre des gangs, en effet, où dominent les pilleurs en chef que sont les multinationales et les principaux États occidentaux. Mais que les maffieux parviennent à s'entendre pour racketter la population selon une règle commune, ou que chacun édicte sa propre loi pour racketter le quartier sur lequel il a la mainmise, voilà qui ne change guère le sort des victimes.

Alors, plutôt que l'OMC, ou telle ou telle de ses institutions, c'est bien le capitalisme lui-même qu'il s'agit de combattre.

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