Poitiers : Pour la régularisation de tous les sans-papiers!14/06/20062006Journal/medias/journalnumero/images/2006/06/une1976.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Poitiers : Pour la régularisation de tous les sans-papiers!

Début 2005, dans la Vienne, plusieurs centaines de sans-papiers, en majorité déboutés du droit d'asile, avaient décidé de s'unir pour demander publiquement leur régularisation. Avec le soutien d'un collectif local, ils ont à plusieurs reprises manifesté, occupé pendant une semaine le théâtre de Poitiers, obtenant ainsi de déposer à la préfecture une liste de 375personnes demandant des papiers en bonne et due forme. Le préfet d'alors s'était engagé à étudier les dossiers «avec intelligence et humanité». Aujourd'hui, c'est l'impasse pour l'immense majorité d'entre eux.

Un an plus tard donc, si des expulsions ont pu être évitées, si des rétentions ont été abrégées et si quelques titres de séjour ont pu être obtenus dans des cas isolés, cela est dû principalement à l'action des sans-papiers eux-mêmes, soutenus par un collectif de solidarité et le Réseau éducation sans frontières (RESF). Obtenir des papiers est devenu tellement difficile que même des conjoints de Français ont du mal à être régularisés.

À cela s'ajoute maintenant la prochaine adoption de la nouvelle loi Sarkozy sur l'immigration (CESEDA) qui, entre autres ignominies, supprime pratiquement la possibilité de régularisation après dix années de présence en France. Les sans-papiers le resteraient donc à perpétuité! De nombreuses mobilisations dans différentes villes du pays ont certes obligé Sarkozy à parler de régulariser des enfants scolarisés et leur famille, mais dans des cas tellement particuliers que cela ne représenterait que 720familles sur tout le pays.

Dans la Vienne, le Conseil général, de droite, a subitement réduit l'Aide sociale à l'enfance, seule prestation à laquelle peuvent prétendre les parents sans papiers: de 397euros à partir de trois enfants, l'aide a été descendue à 250euros par mois. Cette aide ne permet plus ainsi aux familles de régler leur loyer.

Se voyant dans une impasse, 99personnes, principalement originaires de Guinée, ont entamé une grève de la faim le 29mai à Poitiers, demandant la régularisation de tous les sans-papiers du département. La préfecture pour le moment gagne du temps en faisant montre du plus grand cynisme. Elle a demandé la liste des seuls grévistes de la faim, pour n'étudier que leurs dossiers, qui plus est au cas par cas! Le collectif des sans-papiers a refusé et a fourni la liste des 359personnes dont il possède les dossiers. De cette liste, le chef de cabinet du préfet veut maintenant retirer 92personnes sous de faux prétextes. Il n'hésite pas, d'ailleurs, à intimider le porte-parole des sans-papiers et le collectif de soutien, en les accusant de retarder le travail du préfet et en leur expliquant, sans vergogne, qu'ils seront responsables s'il arrive quelque chose de grave.

La municipalité à majorité socialiste, qui s'était peu manifestée l'an passé, fait preuve d'un soutien ostensible (période préélectorale oblige). Ségolène Royal, quant à elle, n'est même pas sortie de son bureau de présidente de la région Poitou-Charentes, ni de sa campagne préprésidentielle. Elle s'est simplement fendue au bout de douzejours d'une note indiquant qu'elle demanderait au préfet de trouver une «issue humaine» à la crise, se gardant bien de parler de régularisation.

Cela n'est pas étonnant, car la gauche qui était au pouvoir de 1997 à 2002 avait laissé des dizaines de milliers de sans-papiers dans la clandestinité, malgré ses promesses électorales de régularisation. Elle porte ainsi une part de responsabilité dans la situation d'aujourd'hui. L'actuel dirigeant du Parti Socialiste, François Hollande, a d'ailleurs clairement dit jeudi 8juin, lors d'un débat télévisé, qu'une régularisation de tous les sans-papiers était exclue si la gauche revenait au pouvoir en 2007.

Le collectif de soutien et le Réseau éducation sans frontières, eux, appellent la population poitevine à des manifestations en faveur de la régularisation de tous les sans-papiers, les mardis et vendredis soirs devant l'école abritant les grévistes de la faim. Il faudra en effet une large mobilisation pour aider les sans-papiers à sortir de l'impasse dramatique où les place la politique gouvernementale.

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