Palestine : Olmert fait la politique du pire14/06/20062006Journal/medias/journalnumero/images/2006/06/une1976.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Palestine : Olmert fait la politique du pire

Mardi 13 juin neuf Palestiniens, dont sept civils, ont été tués et 32 blessés lors d'un bombardement israélien dans une des rues principales de Gaza. Deux missiles ont été tirés, l'un sur une voiture censée transporter des militants palestiniens, et qui a manqué sa cible, l'autre dans la foule. Déjà vendredi 9 juin l'armée israélienne avait tiré un obus sur une plage de Gaza, tuant huit personnes et en blessant trente-cinq. Ainsi Houda Ghaliya, dix ans, indemne parce qu'elle était dans l'eau à ce moment-là, a perdu ses parents et ses trois frères et soeurs.

Le Premier ministre d'Israël, Ehoud Olmert, a dit qu'il «regrettait la mort de civils innocents» et qu'une enquête était en cours pour évaluer la «responsabilité éventuelle» de l'armée israélienne dans le massacre de la plage de Gaza. Cette enquête, rondement menée par l'armée elle-même, a «démontré» mardi 13 que c'était une mine palestinienne qui avait explosé sur la plage. Pour les neuf morts de mardi, Olmert revendique le bombardement, mais déplore à nouveau les morts civils. Car, dit-il, l'armée «ne porte pas atteinte aux civils». Première nouvelle! Non seulement l'armée israélienne occupe tout ou partie des territoires palestiniens depuis bientôt quarante ans, mais elle s'arroge le droit de vie ou de mort sur les populations. Tout se fait sous le prétexte de combattre le terrorisme palestinien, c'est-à-dire, depuis un an, les roquettes artisanales, de faible portée, de peu de puissance et d'aucune précision, tirées sur les localités israéliennes situées le plus près de Gaza.

Les opérations militaires israéliennes se sont déjà soldées par la mort de militants et de dirigeants palestiniens, mais aussi par de nombreux assassinats de civils, en particulier de familles entières, comme le 10 avril, le 20 mai et le 9 juin. La population du territoire de Gaza, évacué par Israël en septembre dernier, vit depuis sous la menace permanente des bombardements. Le territoire est bouclé par l'armée israélienne qui décide de tout ce qui entre et sort, les hommes comme les choses.

Dans sa politique de bouclage de la Palestine, Israël a reçu le soutien de toutes les puissances occidentales. Ces dernières, prenant prétexte de l'arrivée au pouvoir, par les urnes, du parti islamiste Hamas, ont suspendu toutes les aides financières. Ainsi les fonctionnaires ne sont plus payés depuis quatre mois, l'économie est bloquée, les hôpitaux fonctionnent sans médicaments, etc.

Soutenu par les grandes puissances, Olmert peut donc continuer la politique inaugurée par Sharon et tous ses prédécesseurs: créer un état de fait tel qu'Israël puisse décider unilatéralement de la fixation de nouvelles frontières, c'est-à-dire de l'annexion pure et simple de nouveaux territoires. Il l'a d'ailleurs déclaré très hypocritement: «Si les discussions avec Abbas (le président de l'Autorité palestinienne) n'aboutissent pas, Israël prendra son destin en main.» Mais c'est justement Israël qui, par toute sa politique de terreur, rend impossibles les discussions avec Abbas et avec quelque gouvernement palestinien que ce soit. Non seulement des années d'occupation et de répression ont fini par favoriser par contre-coup l'arrivée au pouvoir du parti islamiste Hamas, mais des provocations comme celle du bombardement de familles sur la plage ne peuvent que renforcer, à l'intérieur même du Hamas, les partisans d'une politique jusqu'au-boutiste.

Mahmoud Abbas, le président de l'Autorité palestinienne et dirigeant du Fatah, parti désormais minoritaire au Parlement palestinien, tente d'organiser un référendum qui lui permettrait de retrouver une légitimité pour entamer des discussions avec Israël. Il se réfère pour cela au document élaboré par des prisonniers politiques estimés de la population palestinienne, y compris des militants du Hamas. Le gouvernement et les ministres du Hamas s'y opposent en arguant que, ayant été élus, ils sont les seuls pouvant décider légitimement des affaires du pays. L'opposition entre Fatah et Hamas devient plus aiguë chaque jour. Chacun dispose de ses milices et de ses bastions, et les affrontements armés auraient déjà fait une vingtaine de morts.

Ainsi, on va peut-être vers une véritable guerre civile qui opposerait entre elles les factions palestiniennes. Non seulement elle aurait des effets catastrophiques pour la population, en particulier à Gaza, territoire le plus enclavé, le plus pauvre, le plus surpeuplé mais, par ailleurs, cela fortifierait encore la position d'Olmert et de l'État d'Israël et leur donnerait les mains encore plus libres pour annexer de nouveaux territoires. D'ailleurs, si Olmert voulait pousser au déclenchement de cette guerre entre partis palestiniens, il ne s'y prendrait pas autrement qu'en poursuivant sa politique de terreur, d'étranglement économique et de mépris pour la population palestinienne.

Une majorité des électeurs israéliens ont porté Olmert au gouvernement, après Sharon, parce son parti, Kadima, et le Parti Travailliste avaient promis de mettre un terme à la guerre et à l'occupation des territoires palestiniens, en constituant des «frontières sûres et reconnues» pour Israël. Pour Olmert, ces frontières sont symbolisées par la construction du mur de séparation qui se poursuit. La population d'Israël elle aussi en paye le prix, au moins économique et moral. Mais cette politique risque d'avoir pour elle aussi des conséquences catastrophiques. La tension entretenue entre les Palestiniens, et entre Palestiniens et Israéliens, ne peut que se retourner contre elle. C'est aussi et d'abord en Israël que la population doit se battre pour imposer à ses dirigeants un accord respectant les droits des Palestiniens.

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