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Dans les entreprises
Amiante : Alstom a empoisonné les travailleurs
La société Alstom Power Boilers est jugée depuis le 11 mai par le tribunal correctionnel de Lille pour «mise en danger» de la vie de ses salariés sur son usine de Lys-lez-Lannoy, près de Roubaix. Cent cinquante anciens salariés y portaient plainte contre le président du conseil d'administration et l'ancien directeur de l'usine.
Alstom est accusé de ne pas avoir respecté la législation après l'interdiction de l'amiante en 1996, et de n'avoir rien fait pour empêcher les salariés d'inhaler des poussières d'amiante entre 1998 et 2001, date à laquelle l'usine a été vendue.
Avant l'ouverture du procès, des travailleurs d'Alstom soutenus par les «veuves de Dunkerque» ont dénoncé l'empoisonnement qu'ils ont subi. Leurs auto-collants accusaient: «Alstom: multinationale française racaille...».
Car pendant des dizaines d'années, dans cette usine spécialisée dans la construction de centrales thermiques, de chaudières industrielles et d'éléments de centrales nucléaires, l'amiante était partout. Dans les gants et les couvertures que les ouvriers devaient utiliser pour se protéger de la chaleur, dans les souffleries qui répandaient de l'air rempli de particules, dans les fours, sur les pinces à souder protégées par des coques (et quand ces dernières cassaient, elles étaient jetées à la poubelle à l'air libre), dans les détritus. En 2000, la direction a fait casser un vieux four à la masse, sans fournir de protection aux ouvriers qui faisaient le travail, juste des masques à poussière ordinaires. Aucune information non plus ni protection pour les travailleurs d'une entreprise sous-traitante qui assuraient le nettoyage de l'entreprise.
Les premières journées de ce procès ont montré la mauvaise foi des dirigeants d'Alstom, qui ont nié l'évidence et affirmé au contraire que, dès que l'entreprise a eu connaissance des risques de cancers liés à l'amiante, dans les années 1970, tout avait été fait pour «supprimer autant que possible» son utilisation. Ils ont la même bonne conscience pour justifier qu'aucun contrôle du niveau des poussières n'ait été réalisé entre 1997 et 2001: «La société a estimé qu'il n'y avait pas de raison de faire des prélèvements, parce qu'il n'y avait pas de risques d'inhalation après les mesures mises en oeuvre», a affirmé le président du conseil d'administration d'Alstom Power. Sous prétexte que tout avait été fait pour assurer la sécurité, ils avaient aussi refusé de distribuer un questionnaire pour recenser les travailleurs ayant été en contact avec l'amiante. Cette reconnaissance est pourtant indispensable pour la prise en compte de leur maladie, mais aussi pour retrouver du travail.
Ces arguments minables ne témoignent que du mépris qu'ont ces patrons pour la santé et la vie des travailleurs. Ils ne tiennent pas devant la réalité des faits. Les témoignages des salariés et de l'inspectrice du travail révèlent bien que l'amiante était partout présent dans l'usine. D'ailleurs quand, en 2002, le désamiantage de l'usine a enfin été effectué, 33 tonnes de poussières amiantées ont été évacuées.
Sur les 360 salariés qui travaillaient à l'usine Alstom de Lys-lez-Lannoy et ont respiré des poussières d'amiante à longueur d'année, aujourd'hui, dix sont morts du cancer de l'amiante et plus de quatre-vingts sont malades. Sans compter tous ceux dont on a perdu la trace. Les profits d'Alstom, eux, se portent bien.