USA : Les manifestations du 1er mai pour la régularisation des immigrants10/05/20062006Journal/medias/journalnumero/images/2006/05/une1971.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

USA : Les manifestations du 1er mai pour la régularisation des immigrants

Le bimensuel de l'organisation trotskiste américaine The Spark publie dans son édition du 8mai un article qui explique le succès inégal de cette journée dans la capitale et certaines grandes villes. Il revient aussi sur les projets de loi contre les immigrés actuellement en discussion.

Prévu à l'origine comme une «journée sans immigrants» [où ceux-ci ne travailleraient ni ne consommeraient], le 1er mai a été marqué par une série d'actions qui allaient de puissantes manifestations pendant les heures de travail à des meetings après le travail ou après la classe dans des salles paroissiales dispersées dans une ville. La manifestation au centre de Chicago a été massive et a duré des heures, de même que celle de Los Angeles.

En revanche, à Washington, qui avait pourtant été le siège d'une manifestation très importante le 10avril dernier, le rassemblement n'a guère dépassé 10000 personnes, si tant est qu'il ait même atteint ce chiffre, bien que le nombre de ceux qui ont participé à des actions dispersées au travers de la ville était bien supérieur. Il en fut un peu de même à New York et dans d'autres villes où les actions qui marquaient la journée étaient dispersées. Dans de nombreuses villes, comme Las Vegas, les immigrants étaient appelés à se faire entendre uniquement avant ou après le travail.

Cet éparpillement dans le temps et dans l'espace a atténué le caractère massif de l'expression des immigrés le 1er mai. La véritable force constituée par ces millions de gens n'a pas pu se faire pleinement sentir.

Ce n'est certainement pas parce que les immigrants sont moins déterminés à obtenir leur régularisation. Mais beaucoup de ceux, regroupements ou individus, qui avaient appelé aux manifestations précédentes, ont effectué un tournant et répété que ne pas travailler ou ne pas aller à l'école le 1ermai était contre-productif et pouvait même mener à des licenciements ou à des poursuites judiciaires.

Ce tournant n'est en rien une surprise. Depuis le début, les collectifs qui ont appelé aux manifestations ont recherché l'appui d'organisations patronales comme la Chambre de commerce, l'Association nationale des industriels, l'Association nationale des restaurateurs, l'Association américaine des pourvoyeurs de soins et d'autres. Et une partie de l'argent qu'ils ont collecté provient de fondations financées par la bourgeoisie.

Ils reflètent évidemment les intérêts et les objectifs de la bourgeoisie.

Et ce que la bourgeoisie veut aujourd'hui, c'est une «réforme de l'immigration» qui légalisera pour les patrons l'embauche de travailleurs immigrés sans pour autant donner de véritables droits légaux aux travailleurs immigrés eux-mêmes.

C'est ce que prévoit l'actuel projet de loi du Sénat -le projet Hagel-Martinez- qui permettrait de renvoyer dans leur pays immédiatement plusieurs millions de personnes. Ceux qui sont ici depuis deux à cinq ans pourraient recevoir un permis de travail de trois ans, mais toute une série d'infractions constitueraient autant de motifs d'expulsion. Quant à ceux qui sont ici depuis plus de cinq ans, ils pourraient recevoir un titre de résident permanent mais seulement après six années supplémentaires de travail, puis après encore cinq autres années de travail, avoir le droit de postuler pour la citoyenneté américaine.

Ceux qui seraient autorisés à séjourner légalement devront payer de grosses amendes et de fortes taxes ainsi que les arriérés d'impôts correspondant à la période où ils ont travaillé «au noir». S'ils se retrouvent sans travail pendant deux mois, ils risquent d'être expulsés du pays.

Le vrai sens de cette «réforme», c'est de n'autoriser à rester dans le pays que les travailleurs immigrés qui se taisent, qui ne s'opposent pas à leur patron et acceptent des bas salaires. Il y aura mille raisons pour déclarer les autres «illégaux».

Jusqu'à présent, les patrons ont peut-être été prêts à encourager les manifestations, mais seulement pour faire pression sur le Congrès pour qu'il adopte cette loi. Le sénateur John McCain l'a même déclaré ouvertement au Washington Post: «La participation de centaines de milliers de personnes -en particulier des Hispaniques- aux récentes manifestations à Los Angeles, Chicago et Washington a contribué à doper le soutien au projet de loi.»

Mais les patrons ne sont certainement pas favorables à ce que les manifestations aillent plus loin, et à ce que les immigrants se battent réellement pour une véritable légalisation.

Il ne faut pas que ce soient les patrons et leurs laquais qui aient le dernier mot dans cette affaire. Même si le 1ermai n'a pas eu l'ampleur qu'il aurait pu avoir, il faut espérer qu'il y a bon nombre d'immigrants qui en ont conscience, des immigrants qui comprennent que pour obtenir la légalisation dont ils ont besoin, il leur faudra se détourner des patrons et de leurs politiciens et ne compter que sur leurs propres forces.

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