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Dans les entreprises
SNCM – Marseille : Veolia veut faire avaliser l’aggravation de l’exploitation
À la SNCM, en prévision de la privatisation bientôt effective de l'entreprise, le repreneur de la compagnie de navigation, Veolia Transport, demande aux salariés de se prononcer par oui ou par non sur son projet qui comporte la suppression de 400emplois et une aggravation sensible des conditions de travail et de salaire. Elle menace, si le résultat du vote ne reflétait pas une adhésion massive, de renoncer à sa participation dans l'entreprise.
Après 23jours de grève, les travailleurs de la SNCM avaient voté la reprise du travail, le 13octobre 2005, de crainte d'un dépôt de bilan.
L'accord de fin de conflit stipulait que la Connex, devenue depuis Veolia Transport, détiendrait 28% du capital, le fonds d'investissement Butler Capital Partners (BCP) 38%, les salariés 9% et l'État, par le biais de la CGMF, en conserverait 25%. Il était prévu avec ce plan 400 suppressions d'emplois sur les 2400 que compte l'entreprise.
En échange de la mainmise sur cette compagnie de navigation dont les actifs étaient évalués à 500millions d'euros, Veolia apportait 35millions d'euros. L'État pour sa part versait 8,75millions au capital, ainsi que 113millions (portés depuis à 142,5millions d'euros) pour apurer les pertes, et finançait le plan de suppressions d'emplois.
Depuis, la compagnie naviguait entre deux eaux. Avant que, fin mai, la privatisation de la SNCM soit effective, Veolia Transport en profite pour organiser un véritable chantage vis-à-vis des salariés.
Au début de la semaine du 18avril, chacun d'entre eux recevait de Veolia un document de dix pages, intitulé Projet de relance pour la nouvelle SNCM, sur lequel il doit se prononcer au cours d'un vote qui se terminera le 2mai. Mais, précise le préambule, si une majorité nette ne se prononce pas pour approuver les propositions, dans le cadre d'une participation massive, Veolia retirera sa proposition de reprise de l'entreprise. Ainsi Veolia fait la fine bouche et met ses conditions pour accepter le cadeau de cette entreprise qui compte dix navires, qui possède des immeubles au centre de Marseille, et dont les salariés ont assuré depuis des dizaines d'années la relation maritime régulière et sûre avec la Corse et l'Afrique du Nord.
Vague quant aux modalités d'application, le texte est très clair quant aux intentions de ses auteurs:
«L'engagement de Veolia est subordonné à deux conditions préalables:
La première concerne la délégation de service avec la Collectivité Territoriale Corse -il s'agissait de vérifier que le cadre du cahier des charges définissait bien un niveau de service qui permettrait à la SNCM, si elle remporte, comme nous le souhaitons, ce marché, de conserver son volume d'activité- c'est maintenant chose faite depuis fin mars.
La seconde est d'obtenir un accord du personnel et de ses représentants sur les principes d'une réorganisation. L'accord de fin de conflit d'octobre 2005, entre l'État et les organisations syndicales, prévoyait de limiter à 400équivalents temps plein la diminution d'effectifs...
Veolia Transport ne s'engagera pas sans la volonté affirmée des salariés pour participer, avec les efforts nécessaires, à la réussite de ce projet...»
Les nouveaux dirigeants veulent que les salariés se disent d'accord pour se faire pressurer. La grève avait déjà amplement démontré que les travailleurs de la SNCM étaient hostiles à la reprise de l'entreprise par un groupe privé. Ils n'ont pas obtenu satisfaction et ils ont dû reprendre le travail. Aujourd'hui les dirigeants de Veolia font mine de les consulter, pour pouvoir dire ultérieurement que les décisions sont prises avec leur accord et qu'ils n'ont pas à s'y opposer.
L'objectif annoncé est de fournir chaque année aux actionnaires des bénéfices de 15millions d'euros.
Pour cela il est prévu de faire 20millions d'économies sur la masse salariale. Avec des effectifs réduits, les dix navires actuels continueraient leurs rotations et il y aurait une augmentation du trafic en Méditerranée, en particulier avec le Maghreb. Ce serait évidemment un accroissement de la charge de travail: ainsi les marins travailleraient 183jours par an, au lieu de 171 actuellement. Des travaux assurés par l'atelier sur des navires à quai seraient effectués en cours de trajet par des marins. Des CDD seraient embauchés en CDI. Mais les travailleurs en CDI seraient employés pendant la saison et ne pourraient pas prendre leurs congés dans cette période afin que la compagnie n'ait pas besoin de recourir à des travailleurs en CDD pendant la saison. Les contrôles des travailleurs en arrêt maladie seraient «médicalisés». Enfin, la direction pourrait faire appel à des travailleurs chez eux au dernier moment si elle le juge nécessaire. Les horaires seraient de plus en plus élastiques. Déjà il est question de faire venir du personnel à 3heures du matin pour faire rentrer sur le port les voitures des passagers qui arrivent dans la nuit.
Les organisations syndicales expliquent qu'il faut bien en passer par ce projet sinon Veolia se retirerait. Mais pourquoi se laisser impressionner par cette menace? Quand les dirigeants de Veolia ont choisi, en pleine grève, de faire main basse sur ce pactole, ils savaient bien que les travailleurs n'étaient pas d'accord. Et ils hésiteront d'autant plus à perpétrer leurs mauvais coups s'ils constatent que les travailleurs ne sont pas prêts à se laisser faire.
Il n'y a aucune raison d'accepter d'entrer dans ce piège et de cautionner cette pseudo-consultation. La seule chose à faire, c'est de refuser d'y participer!