Prix des carburants : Menteurs comme pétroliers et ministre réunis05/04/20062006Journal/medias/journalnumero/images/2006/04/une1966.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Prix des carburants : Menteurs comme pétroliers et ministre réunis

L'été dernier, le cours du pétrole brut frisait 70dollars le baril. Les prix flambant à la pompe, et le mécontentement des usagers augmentant en proportion, les compagnies pétrolières avaient alors prétendu ne pas avoir d'autre recours que de répercuter la hausse du brut. Mais, promis-juré, dès que son cours redescendrait, les compagnies répercuteraient sans tarder cette baisse.

Et il s'était même trouvé un ministre, en l'occurrence celui de l'Économie, Thierry Breton, pour venir cautionner à la télévision ces hausses doublées d'un très gros mensonge.

Or, depuis l'automne, le cours du brut est revenu aux alentours de 62 dollars le baril. En bonne logique, l'addition devrait avoir baissé de près de 10% pour le consommateur. Pourtant, il n'en est rien quand on passe à la pompe ou qu'on remplit sa cuve à fioul. Non seulement cela ne coûte pas moins cher que l'été dernier, mais la facture a grimpé d'environ 5 centimes d'euro par litre de super ou de fioul. Un comble!

Interrogés ces jours-ci par des journalistes sur cet étrange phénomène, les responsables de l'Union française des industries pétrolières (Ufip) ont sorti une nouvelle "explication". À les croire, cela tiendrait à l'introduction croissante et coûteuse de biocarburants dans l'essence comme produit fini. Et les pétroliers d'annoncer la somme de 180 millions d'euros, en en profitant pour peinturlurer en vert écolo des hausses qu'ils mettent au compte de l'adjonction de bioéthanol tiré du blé, du maïs ou de la betterave.

S'estimant mise en cause, l'Association des producteurs de blé et de céréales (AGPB) vient de publier un petit décompte éclairant.

Le prix du bioéthanol, produit par des coopératives agricoles ou des entreprises privées, ressort à 600euros/m³, dit l'AGPB, tandis que, ces derniers mois, "le prix du mètre cube d'essence sur le marché d'Amsterdam était de 370 euros". Substituer du biéthanol à de l'essence renchérirait donc le prix de celle-ci... s'il n'existait de substantielles incitations fiscales à l'utilisation des énergies dites renouvelables. Déduction faite de ces aides publiques, le biocarburant revient, en réalité, à 270/m³ pour les compagnies pétrolières. Loin de leur coûter quoi que ce soit, remplacer un mètre cube d'essence par autant de biocarburant leur rapporte donc 100 euros!

Au taux actuel d'intégration de biocarburant à l'essence, les trusts pétroliers gagnent ainsi 32millions d'euros supplémentaires par an, provenant en fait des caisses de l'État. En 2006, cela sera plus encore, puisque le taux de substitution passera de 1,75% à 2,50%. Avec un objectif de 5,75% d'ici à 2010, et des aides fiscales en proportion, c'est un nouveau pactole que les pétroliers récupéreront, et ont déjà commencé à récupérer. Et en plus de percevoir une bonne partie des fonds publics prévus pour inciter à utiliser des énergies renouvelables, ils utilisent encore ce prétexte pour justifier le maintien de prix élevés à la pompe.

Le mensonge a été éventé. Mais qu'importe aux trusts pétroliers, dont les profits en 2005 ont pulvérisé tous les records et qui promettent, cette année, de faire au moins aussi bien... et aussi mal aux consommateurs, en étant couverts par les mensonges gouvernementaux.

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