Dimanche 2 avril, Alcatel et Lucent, toutes deux grandes sociétés essentiellement présentes dans le secteur des télécommunications, ont annoncé leur prochaine fusion. Et aussitôt la presse a repris, avec beaucoup de superlatifs, les lauriers que se sont auto-adressés les PDG des deux firmes, le français Serge Tchuruk pour Alcatel et l'américaine Patricia Russo pour Lucent: "Les deux leaders (...) deviendront le leader mondial de la convergence" de la téléphonie. "Ensemble, Alcatel et Lucent auront un leadership affirmé dans les réseaux (de télécommunications) de nouvelle génération (...) et l'une des plus grandes capacités de recherche et développement dédiées aux communications", ont-ils dit. Que de grands mots, pour la simple juxtaposition de deux industriels dont la première annonce est la décision de... supprimer des emplois.

En effet, dès leur conférence de presse, les dirigeants du futur groupe ont annoncé la couleur. Les "synergies" permettront de faire plus de 1,4 milliard d'euros d'économies: "consolidation de la fonction administrative", "optimisation de la chaîne logistique", "économies en recherche et développement". 10% des effectifs vont être supprimés, soit près de 9000 suppressions d'emplois. Dans ce domaine, les deux sociétés ne font que continuer ce qu'elles font depuis des années. En cinq ans, Alcatel a déjà supprimé plus de la moitié de ses effectifs, passant de 120000 salariés en 2000 à 55000 aujourd'hui (dont 18000 en France). Lucent a procédé à un "dégraissage" comparable.

Voilà en résumé la grande aventure de la prétendue haute technologie, de ce qu'ils osent appeler l'industrie de l'avenir: des destructions d'emplois, des fermetures d'usines, et des milliards de bénéfices supplémentaires pour les actionnaires.