Éducation des tout-petits : Il faut des moyens, pas des détecteurs de déviance!08/03/20062006Journal/medias/journalnumero/images/2006/03/une1962.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Éducation des tout-petits : Il faut des moyens, pas des détecteurs de déviance!

En septembre 2005, l'Inserm, l'Institut national de la santé et de la recherche médicale, publiait un rapport de spécialistes intitulé "Trouble des conduites chez l'enfant et l'adolescent". L'ensemble de l'expertise est une somme de bavardages et de lieux communs sur les facteurs de risque des troubles de conduite dans lesquels on relève pèle-mêle, "la criminalité au sein de la famille, la consommation de drogues par la mère pendant la grossesse, la violence télévisuelle", etc. Et ceci en faisant abstraction de tous les facteurs sociaux qui interviennent dans le développement de l'enfant. C'est dire l'intérêt de l'étude...

En plus, en conclusion, l'expertise propose, sous prétexte qu'elles pourraient être des signes avant-coureurs de délinquance "le repérage des perturbations du comportement dès la crèche et l'école maternelle"! À juste titre, des pédiatres, des psychiatres, des professionnels de l'enfance et de l'éducation se sont élevés contre ces conclusions. Une pétition circule. Sous le titre "Pas de zéro de conduite pour les enfants de trois ans" elle questionne: "Faudra-t-il aller dénicher à la crèche les voleurs de cubes ou les babilleurs mythomanes?". Car les "experts" de l'Inserm proposent de dépister dès le plus jeune âge des signes tels que "indocilité, agressivité" ou encore "froideur affective et tendance à la manipulation", dont on se demande bien ce qu'ils peuvent signifier chez un bébé de 36 mois... Une chose est sûre, l'expertise ne peut que ravir le ministère de l'Intérieur qui, du reste, s'appuie sur ses conclusions pour la mise en place de son projet de loi "sur la prévention de la délinquance".

Enfin, l'escroquerie majeure du rapport réside dans les structures qu'il préconise d'utiliser pour apporter des solutions aux enfants en difficulté. La France, dit le rapport, "dispose d'un réseau bien structuré de services aux jeunes enfants et à leur famille (service de PMI, crèches, écoles maternelles)". Mais de qui se moque-t-il? Il n'est pas besoin d'avoir été baptisé "expert" pour savoir que ces structures essentielles sont, au contraire, en nombre bien insuffisant. Combien de parents se retrouvent-ils sans place en crèche à moins d'avoir, et encore, posé leur demande sur la liste d'attente avant même d'avoir conçu leur bébé? Et c'est une évidence que les classes de maternelles sont trop peu nombreuses, que les institutrices ont un nombre bien trop grand d'enfants dans leurs classes, surtout quand il faut apporter à ces enfants la maîtrise du langage dans des milieux où les parents ne peuvent le faire à la maison, faute de maîtriser eux-même la langue française.

L'éducation des tout-petits ne relève ni du bla-bla, ni des détecteurs de déviance, mais de moyens financiers. C'est le seul choix qu'il faudrait faire!

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