Outreau : Quand la main droite oublie ce que fait la main gauche16/02/20062006Journal/medias/journalnumero/images/2006/02/une1959.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Outreau : Quand la main droite oublie ce que fait la main gauche

Que d'envolées contre les dysfonctionnements de la machine judiciaire et de critiques des abus commis par le juge n'a-t-on pas entendues! On aurait pu croire qu'ils découvraient comment se pratique la justice en France! Or, la commission parlementaire compte quatre anciens juges et six avocats.

Ainsi Philippe Houillon, rapporteur de l'actuelle commission, a lancé lors de l'audition du procureur de Boulogne: «On n'a pas besoin d'attendre la cour d'assises pour se préoccuper de l'humain!» Ce même député UMP, associé à Pascal Clément aujourd'hui ministre de la Justice, avait demandé en janvier 2002, dans un amendement, la possibilité de prolonger la détention provisoire «lorsque les investigations du juge d'instruction doivent être poursuivies».

Le député UMP Alain Marsaud, ancien juge antiterroriste, lui aussi membre de la commission parlementaire, n'a pas été le dernier à fustiger les refus de mises en liberté des accusés d'Outreau lors de leur détention préventive. Or, lors des débats autour de la loi dite «Perben 1», il expliquait qu'il fallait restreindre les demandes de mise en liberté devant la chambre de l'instruction car, disait-il, «nous savons tous combien il arrive parfois que ce type d'appel soit un peu abusif». «On est obligé de réunir un procureur, un greffier, trois magistrats professionnels», ajoutait-il. En 2002, déranger tout ce beau monde pour un prisonnier croupissant en détention provisoire était-il vraiment superflu pour ce quidam?

Lors du vote de la loi dite «Perben 2», son compère de l'UMP, Jean-Paul Garraud, lui aussi ancien magistrat, renchérissait en proposant que la justice puisse refuser d'entendre les personnes en détention provisoire qui «présentent des demandes de mise en liberté à répétition, jour après jour, alors même qu'il leur a été répondu peu de temps auparavant. Cela n'est pas sans poser de sérieuses difficultés».

Ainsi, parmi les membres de la commission d'enquête d'Outreau figurent des députés qui ont participé ces dernières années à amoindrir encore les possibilités de se défendre face à la machine judiciaire et policière, s'alignant sur la démagogie du gouvernement. Les mêmes se sont gardés de remettre en cause les libertés des patrons et des puissants à passer le plus souvent entre les mailles du filet, même quand d'aventure il y avait un magistrat pour se montrer exigeant.

Que ce beau monde de députés, ex-magistrats ne s'inquiète pas. Il n'est pas prévu de commission parlementaire pour examiner la façon dont l'enquête sur les HLM de la Ville de Paris a été menée, avec comme résultat de ne pas poursuivre les hommes politiques mêlés à cette affaire. L'appareil judiciaire a su faire le tri avant comparution.

Partager