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Leur société
TVA réduite dans la restauration : Des aides aux restaurateurs pour faire leur beurre?
Finalement, et malgré une ultime rencontre entre Chirac et Angela Merkel, le gouvernement n'a pu obtenir que l'Union européenne entérine la baisse de la TVA de 19,6% à 5,5% dans la restauration. Cette décision a provoqué la colère des patrons français de cette branche.
Ils crient à la trahison, rappelant que Chirac s'était engagé sur ce point lors de sa campagne électorale de 2002, fixant même janvier 2006 comme ultime échéance pour la mise en place de cette TVA réduite. André Daguin, président de l'Union des métiers et des industries de l'hôtellerie, a même menacé: "Nous qui passons pour des amis de la majorité, nous pourrions changer notre fusil d'épaule !"
Pour tenter d'apitoyer l'opinion publique et de justifier par avance une mesure qui pourrait priver l'État de 3 à 4 milliards d'euros de recette par an, les patrons des hôtels-restaurants se sont largement répandus dans les médias. Si certains admettent qu'ils pourraient en profiter pour améliorer les marges bénéficiaires, ils sont surtout unanimes pour déclarer que l'échec des négociations sur ce dossier les empêchera de baisser leurs prix, d'augmenter les salaires et d'embaucher 40000 à 45000 salariés.
Bien que ces chiffres soient largement gonflés, selon certains analystes qui parlent d'un potentiel de seulement 10000 à 12000 emplois, l'argument de la création d'emplois est évidemment destiné à justifier par avance tous les cadeaux que pourrait faire le gouvernement à cette branche du patronat. Un cadeau consistant, car même en admettant que le secteur embauche vraiment 40000 personnes supplémentaires, cela représenterait une subvention d'au moins 75000 euros par emploi créé. Le contribuable a vraiment bon dos!
Quant à augmenter les salaires, les patrons-restaurateurs pourraient effectivement le faire. Mais ce n'est pas sans raison que cette branche trouve difficilement des volontaires pour les postes qu'elle propose, car si les patrons sont toujours prêts à encaisser, ils ne sont guère enclins à débourser pour rémunérer correctement leurs employés. La preuve en a déjà été administrée lorsqu'en 2004, et pour les consoler d'un premier échec des négociations au niveau européen sur la baisse de la TVA, Raffarin leur a fait cadeau d'allégements de charges pour un montant global de 1,5 milliard d'euros, les salaires n'ont pas bougé pour autant.
Les préoccupations sociales de ces patrons s'illustrent d'ailleurs dans la menace, que maintenant certains brandissent, de dénoncer la convention collective et de remettre en cause les 35heures.
Beaucoup de ces restaurateurs pleurent la bouche pleine, mais ils sont sans complexes, et il y a fort à parier que le gouvernement trouvera une fois de plus les moyens de les consoler.