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Égypte : Les réfugiés soudanais chassés par la police: 27 morts
Dans la nuit du 30 décembre, à 4 heures du matin, près de 4000 policiers ont envahi avec camions et canons à eau le square de Mohandessin, où campaient depuis octobre dernier plusieurs milliers de réfugiés soudanais, femmes, hommes, enfants, à proximité des locaux du Haut commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR). La violence de l'intervention des brigades antiémeutes, chargeant à coups de matraques, après les canons à eau, s'est traduite par la mort de vingt-sept réfugiés, selon l'ambassade du Soudan au Caire, et vraisemblablement de nombreux blessés.
Fuyant la guerre civile qui a ravagé pendant deux décennies le sud du Soudan et provoqué la mort d'environ deux millions de personnes, plusieurs centaines de milliers de Soudanais du sud avaient trouvé refuge dans des conditions précaires dans les pays voisins, dont environ 30000 en Égypte. Près de 4000 d'entre eux s'étaient installés depuis trois mois place Mustafa-Mahmoud, à Giza, afin d'obtenir du HCR, l'autorité compétente en la matière, le statut officiel de réfugié politique, c'est-à-dire la "carte bleue" qui leur permettrait d'obtenir le versement d'une maigre pension et de faire une demande d'émigration vers les États-Unis ou le Canada. Dans les conditions de chômage et de misère qui sont celles d'une grande partie de la population laborieuse du Caire, les réfugiés du Soudan méridional n'espéraient guère trouver un emploi qui leur permette de vivre et de faire vivre leur famille, pas plus que de se loger dans une ville déjà en proie à une grave pénurie de logements.
Or, depuis la signature en janvier 2005 d'un traité de paix entre le gouvernement de Khartoum et les forces armées du sud, le HCR des Nations unies avait cessé de considérer les réfugiés comme des demandeurs d'asile politique cherchant refuge en Europe ou en Amérique du Nord, pour les classer comme "immigrants économiques" et, de ce fait, arrêter de leur verser les quelques subsides auxquels ils pouvaient prétendre auparavant.
Depuis des mois, déjà, les réfugiés soudanais ont organisé des protestations, des manifestations et des sit-in afin d'obtenir que les autorités internationales se penchent sur leur sort. Ils redoutent la perspective d'être renvoyés au Soudan, où règnent toujours la misère, la famine et la guerre, puisque le Darfour, à l'ouest du pays, est toujours en proie aux violences de l'armée et des milices alliées du pouvoir. S'ils ont ensuite décidé de s'établir en campement près du HCR, c'est pour alerter l'opinion publique et tenter de faire pression sur les Nations unies, afin d'obtenir le statut de réfugié qui leur avait été refusé. Comptaient-ils sur la neutralité sinon le soutien du gouvernement égyptien? En tout cas, leur présence au vu et au su de tous dans ce quartier résidentiel de l'ouest de l'agglomération cairote n'avait apparemment que trop duré pour les sbires de Moubarak.
À présent, pour autant que des renseignements puissent être obtenus sur le sort des hommes, des femmes et des enfants chassés du campement, ils seraient vague après vague expulsés vers le Soudan. Sans droit, sans travail, sans lieu où se réfugier, repoussés par les gouvernants des pays riches, dont ceux de l'Union européenne qui n'a que faire des pauvres de l'Afrique subsaharienne.