Budget de la recherche : À qui profitent les subventions?04/01/20062006Journal/medias/journalnumero/images/2006/01/une1953.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Budget de la recherche : À qui profitent les subventions?

Le budget du ministère de la Recherche a été voté par le Sénat à la fin du mois de décembre. Les sénateurs n'ont pas eu de mots assez forts pour se féliciter de son augmentation, soulignant à quel point la recherche était importante pour l'avenir du pays, de ses entreprises, de sa jeunesse etc.

Ces discours enrobaient mal le fait que, dans ce budget, l'augmentation principale est celle qui tombe directement dans les coffres des entreprises privées. Sur les dix milliards d'euros que l'État consacre à la recherche (équipements scientifiques, salaires des chercheurs, frais de fonctionnement des différentes institutions), près de un milliard et demi servira de subvention aux entreprises privées sous forme de crédits d'impôt.

Le ministre de la Recherche et les sénateurs mettent en avant les "jeunes entreprises innovantes" (JEI): totalement exonérées d'impôts sur les bénéfices pendant trois ans, puis exonérées à 50% les deux années suivantes; et aussi totalement exonérées de cotisations sociales patronales pour le personnel de recherche. Mais il ne s'agit pas là d'entreprises créées par de jeunes étudiants faisant de l'informatique dans leur garage puisque ces JEI peuvent avoir jusqu'à 250 employés et être la propriété de sociétés d'investissements multimilliardaires.

Sur les quelque 3200 sociétés qui bénéficient de ces réductions d'impôt, seule la moitié sont des PME. Toutes les entreprises, y compris les plus grosses et les plus bénéficiaires, peuvent déduire de leurs impôts 5% de leur budget de recherche et 45% de l'augmentation de ce budget, avec un plafond de déduction qui vient d'être porté à huit millions d'euros par an. Tout cela est évidemment cumulable avec d'autres déductions, pour d'autres motifs, et avec des subventions directes versées par l'Europe, la région, la commune, etc.

Ce sont donc les plus gros groupes qui profitent le plus d'une loi faite sur mesure pour eux. Ainsi les industries automobiles, quoique faisant des milliards de bénéfices, font passer une partie des études pour les nouveaux modèles en "recherches sur la pénétration des mobiles dans l'air" déductibles des impôts. Plus fort encore, les industries du luxe, dans leur lutte contre les contrefaçons, peuvent se faire rembourser leurs frais de justice puisqu'il agit de défendre des brevets. Certes, si l'on considère que le sac Vuitton est une conquête de la science au même titre que la pénicilline...

L'État fait la quête pour la recherche médicale, et dans le même temps il subventionne la recherche dans la haute couture ou dans les cosmétiques. Un symbole de l'aberration de leur monde.

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