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Leur société
Vote des immigrés : À droite comme à gauche... l'Arlésienne
Voilà qu'on reparle du droit de vote des immigrés aux élections locales. À droite, le 25 octobre, Sarkozy a estimé, qu'accorder ce droit ne "serait pas anormal", s'attirant en retour la réplique de Villepin pour qui, "c'est la nationalité qui donne le droit de s'exprimer".
Dans la semaine du 5 au 12 décembre, une soixantaine d'associations, dont la Ligue des droits de l'homme, soutenues par les partis de gauche, organisent une "votation citoyenne" dans une centaine de villes dont l'objet est de répondre à la question "Êtes-vous pour la reconnaissance du droit de vote et d'éligibilité des résidents étrangers aux élections locales?"
Ce droit serait un droit élémentaire. Il serait même normal que les travailleurs immigrés puissent voter et se faire élire à tous les mandats et pas seulement aux élections locales. D'ailleurs depuis 1998 les ressortissants de l'Union européenne, Allemands, Britanniques, Portugais etc. peuvent au moins être électeurs et éligibles aux élections municipales, même s'ils peuvent seulement voter aux élections européennes. Mais ce droit de vote aux élections locales est refusé aux Algériens, Marocains, Turcs, etc. pourtant bien plus nombreux à vivre, travailler et payer des impôts en France et pas seulement des impôts locaux mais aussi nationaux, comme ceux sur le revenu ou la TVA.
À droite, la prise de position de Sarkozy a pu surprendre, mais de la part de ce démagogue tout est bon pour se distinguer dans sa compétition avec les rivaux de son camp, même des positions paradoxales comme celle-là. À gauche, cela fait des dizaines d'années que ce thème est évoqué. Le droit de vote des immigrés figurait déjà dans le Programme commun de la gauche signé en 1972 par le PS et le PCF. En 1981, Mitterrand en avait fait une de ses 110 propositions de gouvernement. Mais une fois élu, il estima que "l'état des moeurs" des Français ne permettait pas son application et il remisa donc cette proposition.
Près de vingt ans après, Jospin avait fait adopter à l'Assemblée une proposition de loi en faveur du droit de vote des immigrés mais elle ne fut jamais mise à l'ordre du jour du Sénat, sous prétexte qu'il y avait d'autres priorités et que la droite y était majoritaire. En 2002, peu avant l'élection présidentielle, le même Jospin remettait le couvert mettant cependant comme condition, une présence en France de dix ans, quand Mitterrand parlait de seulement cinq ans. Mais contrairement à son aîné, il n'eut même pas besoin d'enterrer sa proposition car il n'y eut pas d'après 2002 pour Jospin.
Aujourd'hui, Hollande et d'autres dirigeants socialistes font feu de tout bois et somment Sarkozy de réaliser "tout de suite" cette mesure qui "doit être un acte de gouvernement et pas une proclamation de circonstance". Jack Lang prend la pose en affirmant sur France Inter que, dans les deux mois qui suivront une victoire électorale du PS, celui-ci organisera un référendum sur la question. Mais l'organisation d'un référendum relevant du seul président de la République... tout dépendra du résultat de cette élection... et du fait que l'éventuel élu socialiste soit disposé à tenir les engagements de son parti.
Le droit de vote des immigrés à toutes les élections ne doit pas être seulement un sujet de conversation pour politiciens. Il faudra donc le conquérir.