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Italie : Prodi ou Berlusconi, c'est la Confindustria qui fixe le programme
Romano Prodi, ancien président de la Commission européenne, sera le candidat de la coalition de centre-gauche aux prochaines élections législatives italiennes, prévues au printemps prochain. Ainsi en ont décidé les "primaires" organisées dimanche 16 octobre par l'ensemble des partis de cette coalition.
Depuis cinq ans, c'est une coalition de droite qui gouverne l'Italie, sous la direction du magnat de l'audiovisuel Berlusconi. Les dirigeants du centre-gauche espèrent que cette droite a désormais suffisamment déçu la population et l'électorat pour que la victoire leur revienne facilement. Ils pensent aussi que ces cinq ans auront permis à une grande part des électeurs d'oublier la déception qui était la leur en 2001, après cinq ans de gouvernement de centre-gauche, et qui avait permis la victoire de Berlusconi.
Confiants dans ce retour du balancier électoral, ces prétendants à l'alternance ne jugent donc pas utile de faire des promesses aux couches populaires et ne veulent, vis-à-vis d'elles, être liés par aucun engagement.
Autant dire que les travailleurs n'ont pas grand changement à espérer d'un éventuel gouvernement de Romano Prodi. Avant d'être président de la Commission européenne, celui-ci a déjà été président du Conseil des ministres italien, de 1996 à 1998. Ce politicien démocrate-chrétien a mené alors une politique d'austérité draconienne, payée essentiellement par les classes populaires. Auparavant, il avait d'ailleurs présidé durant des années l'IRI, l'Institut de la reconstruction industrielle, qui coiffait l'ensemble des entreprises du secteur d'État. En tant que tel, il porte la responsabilité des nombreuses privatisations effectuées dans les années 1980 et 1990, et constituant autant de cadeaux scandaleux faits au secteur privé.
Ce que proposent les partis de gauche et de centre-gauche n'est donc que la réédition d'une expérience déjà faite. Ce sont les DS, les "Démocrates de Gauche" (democratici di sinistra), issus de l'ancien Parti Communiste et principal parti de la gauche italienne, qui ont propulsé Prodi à la tête d'une coalition appelée L'Olivier, et permis à celui-ci de gouverner le pays de 1996 à 2001. Aujourd'hui, le nom a changé: la coalition qui se présente face à celle de Berlusconi s'appelle L'Union (L'Unione). Pour le reste, elle comprend les mêmes partis: les DS, les Verts, et divers partis du centre regroupés notamment au sein de La Marguerite.
Cette fois cependant, s'ajoute à ces partis le Parti de la Refondation Communiste, appelé plus simplement Rifondazione et qui comprend les militants de l'ancien PC ayant tenu à garder l'étiquette communiste. Alors qu'en 1998, Rifondazione avait été jusqu'à faire tomber le gouvernement de centre-gauche en tentant d'obtenir de celui-ci un engagement sur les 35 heures, cette fois-ci le parti se rallie dès le début à Prodi. Bertinotti, principal dirigeant de Rifondazione, a justifié ce ralliement en disant qu'il faut avant tout chasser le gouvernement Berlusconi.
L'organisation de "primaires" au sein du centre-gauche pour choisir celui qui conduira la coalition lui fournit une autre justification. Dans ces primaires, Bertinotti a présenté sa candidature face à Prodi et à quelques autres candidats en déclarant que plus il aurait de voix, plus il serait en mesure ensuite d'obtenir que le programme du centre-gauche comporte des avancées réelles pour les travailleurs.
Eh bien, le résultat des "primaires" est là. Le 16 octobre, plus de 4 millions d'électeurs de gauche se sont déplacés, dont 14,7% (633700) ont donné leur voix à Bertinotti. Avec 74,1% des voix, Prodi, qui bénéficiait avant tout du soutien des DS -alors qu'il n'est pas membre de ce parti- en sort légitimé comme éventuel futur Premier ministre de L'Union. Et les discours de Bertinotti, qui déclarait qu'une fois Prodi désigné à la tête de L'Union, on pourrait discuter du programme de celle-ci, apparaissent pour ce qu'ils sont: du vent. Prodi a déclaré que c'est lui qui se chargera de la rédaction du programme, comme c'est prévu d'ailleurs dans les accords ayant mis sur pied L'Union.
Pendant ce temps, la Confindustria -équivalent italien du Medef- alterne savamment les déclarations, l'une pouvant être interprétée en faveur du centre-gauche, l'autre en faveur du centre-droit. C'est évidemment le meilleur moyen d'obtenir que les deux regroupements concurrents soient à ses pieds et rivalisent pour promettre de faire ses quatre volontés.
En revanche, aux travailleurs, aux couches populaires, ce centre-gauche qui se propose de remplacer Berlusconi n'a rien à offrir d'autre que quelques phrases générales. Bertinotti et Rifondazione peuvent toujours dire aujourd'hui qu'il faudra aller au-delà; ce n'est certes pas en se ralliant à Prodi, lui garantissant dès le début qu'il n'aura pas de contestation sur sa gauche, qu'ils aident les travailleurs italiens à se préparer à imposer une autre politique.