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Leur société
Le ministre des Cultes en action
Sarkozy a affirmé, lundi 19 septembre, qu'il est " le ministre de l'Intérieur qui s'est le plus senti ministre des Cultes " et a, une fois de plus, exposé son espoir de voir la religion prendre encore plus d'importance dans la vie sociale. Puisqu'il est ministre et candidat au poste de président, il ne s'agit pas seulement d'un voeu pieux, mais aussi d'une politique qui a déjà des effets néfastes et qu'il se propose de poursuivre.
C'est en effet sous son égide qu'a été formé le Conseil français du culte musulman, qui a pour fonction de permettre à quelques notables religieux réactionnaires de parler au nom des cinq millions de membres de la " communauté musulmane ". Le ministère de l'Intérieur évalue lui-même à 10% le nombre de musulmans pratiquants. Mais qu'importe, Sarkozy donne moyens, reconnaissance et subventions aux religieux qu'il choisit lui-même.
Sa sollicitude ne s'arrête évidemment pas à l'islam. Il s'affirme catholique, se fait photographier en compagnie d'évêques et de cardinaux et, à la suite de tous les gouvernements, prend soin des intérêts matériels des curés. Ainsi, une partie du denier de l'Église (ex-denier du culte), don annuel que font les catholiques à leur Église, est déductible des impôts. Cela a d'abord été 50%, avec l'amendement Coluche qui concernait toutes les associations, en 1989. C'est passé pour certaines à 60%, puis, depuis cette année, à 66%. Cela représente un cadeau d'environ 100 millions d'euros par an à l'Église catholique.
Sarkozy tient à ce que les religions, toutes les religions, aient les moyens de se faire entendre car, dit-il, " souvent les responsables religieux parlent trop bas ". Ils parlent en tout cas assez haut pour imposer l'enterrement du pape en boucle sur toutes les chaînes et à toutes les heures pendant trois semaines ! Assez haut également pour continuer à faire pression pour tout ce qui touche les questions de morale et de sexualité, quand ce n'est pas l'éducation et la vie quotidienne, comme la condamnation de l'IVG et de la contraception, celle du divorce comme celle de l'homosexualité, en passant par les pressions pour le port du voile dans les milieux musulmans. Tout cela, Sarkozy voudrait que cela se renforce car, dit-il, " la religion est un facteur d'apaisement ".
Dire cela au pays de la Saint-Barthélémy pourrait être simplement risible, si ce n'était pas un programme politique : faire prendre en charge ce qu'il appelle la " cohésion sociale " (et qui n'est que la résignation sociale) par la religion et ses ministres. C'est toujours " le sabre et le goupillon ". Même si aujourd'hui l'offre religieuse s'est diversifiée, le fonds de commerce reste le même.
Sarkozy précise qu'il faut faire la distinction entre le " fondamentaliste ", celui qui applique scrupuleusement sa religion et qui est à ce titre estimable, et " l'intégriste ", celui qui veut " plaquer sa réalité sur celle de l'autre " et qu'il faut combattre. Mais imposer ses croyances à ses propres enfants, ce qui est obligatoire dans toutes les religions, c'est fondamentaliste ou c'est intégriste ? Et imposer ses préjugés à " sa communauté " (définie comment ?), c'est recommandé ou c'est interdit ?
Pour Sarkozy, il s'agit bien sûr d'attirer les voix réactionnaires, par des arguments flattant les préjugés religieux. Il dispute à de Villiers celles des catholiques fondamentalistes, et cherche même si possible à attirer celles des musulmans les plus traditionalistes. Mais, en même temps qu'il utilise la montée des préjugés, Sarkozy contribue à les renforcer et à donner de nouveaux moyens matériels et moraux aux appareils religieux.