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Dans les entreprises
Renault Cléon (Seine-Maritime) : Des conditions de travail qui se dégradent
L'usine Renault de Cléon, près de Rouen, fabrique des moteurs et des boîtes de vitesses. Pour les plus de 6000 personnes qui y travaillent, en comptant les intérimaires, les prestataires et les salariés des entreprises extérieures, c'est dans tous les ateliers, dans tous les secteurs, des conditions de travail qui se dégradent. La direction cherche à supprimer des postes, à faire la chasse aux temps morts, à faire pression sur les ouvriers.
L'écran de fumée des trente-cinq heures
En 1999, lors du passage aux 35 heures, on nous expliquait que la "réduction du temps de travail" allait permettre d'embaucher des jeunes et d'avoir plus de temps libre.
Mais la "RTT" s'est surtout traduite... par un allongement et une intensification de la journée de travail. Pour un salarié en équipe par exemple, cela a signifié rester trente minutes de plus dans l'usine avec vingt minutes de pause en moins. En contrepartie, le temps ainsi travaillé en plus devait permettre de prendre des congés supplémentaires ou de rester à la maison en période d'activité plus basse. Avant de mettre les travailleurs en repos ou d'annuler un repos prévu, la direction était censée respecter un délai de prévenance minimal de dix jours.
Mais l'accord sur les 35 heures, signé par tous les syndicats à l'exception de la CGT, ajoutait à cela "sauf en cas de circonstances exceptionnelles" une phrase tellement floue qu'elle donnait carte blanche à la direction pour faire ce qu'elle voulait. Une rupture d'approvisionnement? Une machine en panne? Tout peut être qualifié de circonstance exceptionnelle...
Des salaires en trompe l'oeil
Renault a fait le choix d'intégrer des primes dans le salaire de base. D'abord, cela a concerné la prime dite de "complément mensuel uniforme", une prime mensuelle de près de 150 euros. Maintenant, la prime dite "de printemps" va être intégrée au salaire.
À force de rogner sur les salaires, trop de monde se retrouve avec un salaire de base juste au smic, voire en dessous. Intégrer les primes permet ainsi à Renault de réaliser un tour de passe-passe pour faire croire que les salaires sont remis à niveau.
De plus, Renault profite du chômage pour ne pas respecter les conventions collectives. Selon celles-ci il est prévu pour les titulaires de bac pro ou bac technique de la mécanique un "seuil d'accueil" au coefficient 215, ce qui correspond au P3.
Depuis vingt ans, le coefficient 165 avait quasiment disparu chez Renault. Il correspondait à un opérateur qui n'avait pas son CAP et qui débutait. Mais lors des récentes vagues d'embauches à Cléon (depuis 2000), Renault embauche les titulaires de bacs au coefficient 185 (P1), voire 165, et c'est à prendre ou à laisser. Cela représente une perte de plus de 200 euros par mois.
La direction se défend en disant que c'est temporaire, le temps de vérifier les compétences du salarié... mais il faudra au minimum cinq ans -et souvent beaucoup plus- à un jeune embauché pour atteindre le salaire qui aurait dû être le sien dès le début. Et cela concerne des centaines de jeunes.
La sécurité? Une priorité... dans les statistiques de la direction
La direction se vante de ses "bons résultats" en matière de sécurité: elle met en avant le nombre de jours "sans accident de travail avec arrêt pour tout le personnel Renault". Les camarades intérimaires et les travailleurs des entreprises extérieures, eux, ne sont pas comptabilisés. Or, les accidents sont bien plus nombreux chez les intérimaires, soumis à des pressions très fortes et souvent moins bien formés.
Pour faire baisser les statistiques, la direction s'est attaquée... à la façon de comptabiliser les accidents. Lorsqu'on est accidenté au travail, même si l'on doit rester chez soi ou à l'hôpital, Renault nous compte en "absence autorisée payée".
La hiérarchie explique ouvertement que cela coûte moins cher de nous payer à la maison que de payer à la Sécurité sociale des cotisations accident majorées. Renault économise ainsi de grosses sommes sur le dos de la Sécurité sociale, tout en apparaissant comme à la pointe de la sécurité. C'est une façon de masquer l'aggravation des conditions de travail de ces dernières années.
De plus en plus de travailleurs sous-traitants
De plus en plus d'entreprises sous-traitantes sont aujourd'hui à demeure sur le site de l'usine : des entreprises de nettoyage (ISS, TFN), d'électricité (SNEF), de maintenance, de tri de pièces, de travaux divers... En tout, les salariés de près d'une centaine d'entreprises viennent travailler chez Renault. Un bon nombre des travaux effectués par ces sous-traitants l'étaient dans le passé par des travailleurs de Renault.
Dans la grande majorité de ces entreprises, les salaires et les conditions de travail sont bien plus défavorables que chez Renault... et c'est peu dire. Dans une entreprise de nettoyage comme ISS, les contrats de travail sont de quatre, ou cinq, ou au mieux sept heures par jour... et payées au smic. Les femmes et les hommes qui y travaillent ont ainsi de tout petits salaires. Certaines femmes qui vivent seules avec leurs enfants sont par la force des choses devenues des travailleuses pauvres!
La devise des patrons étant toujours "diviser pour mieux régner", ils profitent du fait que les travailleurs n'ont pas le même patron. Et pourtant, tous travaillent sur le même site. Des liens de solidarité existent entre tous les travailleurs, ce qui sera déterminant pour les futurs combats.