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Leur société
Vente à la découpe : La loi des spéculateurs
La vente à la «découpe» a fait couler tellement d'encre que le gouvernement s'est senti obligé de faire un petit geste. Le Parlement va donc voter une loi censée protéger les intérêts des locataires que les spéculateurs de l'immobilier se faisaient fort d'expulser s'ils ne pouvaient pas racheter leur appartement.
Cette fameuse vente à la «découpe» n'est en fait qu'une opération de spéculation immobilière à grande échelle à laquelle se livrent les grands propriétaires immobiliers, banques, compagnies d'assurances, etc. Le tour de passe-passe consiste à vendre des immeubles des quartiers les plus chers des grandes villes à des sociétés, le plus souvent filiales des vendeurs. Celles-ci se chargent ensuite de revendre, appartement par appartement, à des prix très largement augmentés, les spécialistes parlant d'une plus-value moyenne de 50%.
La méthode n'est pas nouvelle, car c'est déjà ce qui s'était fait à l'époque de la rénovation des Halles, pour chasser la population pauvre du centre de Paris. Mais, avec le boom de l'immobilier, c'est tellement juteux que, depuis 2001, les ventes à la «découpe» ont augmenté de 50%. Aujourd'hui certains font mine de s'en offusquer car la soif de profits immédiats des spéculateurs est telle que des personnalités du monde politique ou du show-bizz n'auraient pas les moyens de se racheter leur appartement. Lionel Jospin par exemple aurait dû ainsi quitter les beaux quartiers... mais sans doute pas, quand même, pour aller vivre dans le 93.
Le projet de loi propose un droit de préemption, c'est-à-dire de priorité au rachat, pour les locataires. C'est déjà le cas pour toute vente d'appartement loué mais le prix proposé devrait être basé sur celui de la vente à la société acheteuse, ce qui serait un moyen d'éviter la flambée des prix. Mais ce droit de préemption ne s'applique pas si le propriétaire s'engage à louer les appartements pendant six ans. Le projet de loi estime cela «plus raisonnable»... mais pour qui?
La loi prévoit aussi que les locataires invalides, ceux âgés de plus de 70 ans ou dont les revenus annuels sont inférieurs à 30 580 euros (45702 euros pour un couple) pourront rester dans leur appartement même s'ils ne l'achètent pas.
Trois des principales associations de consommateurs, dont la CNL, ont d'ores et déjà pointé du doigt les insuffisances de cette loi. Le ministre délégué au Logement leur répond qu'il est difficile d'aller plus loin sans heurter le droit de propriété. Effectivement c'est là tout le problème et, en ne s'attaquant pas aux spéculateurs, cette loi censée protéger les locataires est, pour reprendre la déclaration du Collectif des locataires découpés, une «véritable opération de blanchiment des opérations de vente à la découpe».