Contrat «nouvelle embauche» : Une débauche permanente offerte aux patrons15/06/20052005Journal/medias/journalnumero/images/2005/06/une1924.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Contrat «nouvelle embauche» : Une débauche permanente offerte aux patrons

L'institution d'un nouveau contrat de travail dit «nouvelle embauche», limité pour le moment aux petites entreprises, c'est-à-dire à celles qui ont moins de dix salariés, est une des mesures phares annoncées par de Villepin. C'est elle qui, à juste titre, a provoqué le plus d'émotion parmi les travailleurs et de protestations de la part de tous les syndicats.

Si de tels contrats devaient être généralisés, ce qui est peut-être dans les intentions du gouvernement, ce serait un important retour en arrière.

Ce contrat «nouvelle embauche» repose sur une période d'essai de deux ans. Pendant deux ans donc, à tout moment et sans avoir aucun prétexte à donner, l'employeur peut jeter à la rue son salarié dans la minute qui suit, donc sans le moindre préavis. C'est là évidemment la porte ouverte à tous les abus. La simple réclamation par le salarié du paiement de ses heures réellement travaillées, litige très courant dans les petites entreprises, pourrait entraîner la mise à la porte immédiate du salarié. Et ne parlons pas de tout ce qui peut être subi: brimades, vexations, injures, non-respect des règles élémentaires de sécurité, non-respect de l'organisation et de la durée de la journée de travail... sous peine d'une rupture immédiate de contrat.

À l'heure actuelle, pour les salariés, la période d'essai n'existe pas si la durée de celle-ci n'est pas précisée explicitement dans un contrat de travail écrit. En règle générale, elle varie de huit jours à un mois pour les ouvriers. Pour la maîtrise, elle tourne autour de deux mois, et trois pour les cadres.

S'exprimant au nom du Medef, Seillière a tenu à dire que, si ce projet allait dans le bon sens, la mesure était encore trop limitée. Évidemment, il aurait souhaité que tous les patrons aient accès à ce type de contrat, et pas seulement pour les nouveaux embauchés. Interrogé sur l'extension de cette mesure, de Villepin n'a pas dit oui, mais n'a pas davantage dit non. Si tel devait être l'avenir, tous les salariés deviendraient des précaires permanents. Et contrairement aux propos mensongers du gouvernement, bien loin de favoriser l'embauche, ce nouveau contrat encouragera au contraire les employeurs à embaucher le moins possible, et ils le pourront d'autant mieux qu'ils auront à disposition des salariés dont ils pourront se débarrasser comme ils le veulent.

Présentant sa mesure, de Villepin a osé, sans rire, parler de l'institution d'un nouveau contrat à durée indéterminée, assorti de «quelques aménagements». Mais s'il s'agit bien de la fin des CDD, il s'agit aussi de la fin des CDI.

Quant à l'aide au reclassement, c'est du vent. Des reclassements possibles, il y en a si peu que la principale consigne donnée à l'ANPE est de rayer de ses listes un maximum de chômeurs, sans offrir, et pour cause, d'emploi à ceux-ci.

Devant le tollé provoqué par les mesures du gouvernement et l'annonce d'une journée de mobilisation organisée par la CGT le 21 juin, de Villepin a fait donner son ministre du Travail Borloo, spécialisé dans le brassage de vent. Ce dernier a annoncé son intention de recevoir les syndicats sur le sujet, sans remettre en cause les principes arrêtés par de Villepin. Voilà pourquoi cette nouvelle attaque, qui vise une fois encore à précariser toujours plus les travailleurs, justifie une forte réaction du monde du travail.

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