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Leur société
Parti Socialiste : Beaucoup de candidats... mais pour quoi faire ?
Laurent Fabius a donc été écarté de la direction du Parti Socialiste pour n'avoir pas respecté le vote majoritaire des militants, et choisi d'appeler à voter "non" au référendum sur la Constitution européenne. Dans le Parti Socialiste, où à l'image des autres partis de gouvernement, à droite, les principaux dirigeants regroupent autour d'eux des clans qui s'emploient à le propulser dans l'espoir d'être payés de retour, ce rappel aux règles reste purement formel, et ne permet pas de faire des pronostics sérieux sur ce qui se passera d'ici 2007. Car cette mise à l'écart prend place dans la stratégie élaborée par les uns et les autres en vue de la présidentielle de 2007.
Pour la direction du Parti, il s'agit de se démarquer d'un rival qui serait en bonne position du fait qu'il a su choisir le camp vainqueur dans ce référendum, et qu'il compte en tirer bénéfice. Son calcul se révélera-t-il fondé ou pas? L'avenir le dira. Hollande, Strauss-Kahn et les autres postulants régleront leurs comptes lors du congrès prévu pour l'automne, en public, mais plus encore dans les coulisses, y compris au-delà de ce congrès.
Quant à Fabius, il a depuis choisi l'opportunité du référendum pour se poser en "homme providentiel" au-dessus de la mêlée, s'adressant directement à l'opinion publique par-dessus la tête de l'appareil de son parti et ne dépendant en rien de celui-ci. De ce point de vue, son éviction de la direction ne le dessert pas forcément, et lui permet en tout cas de se poser en victime lynchée pour avoir eu raison seul contre tous. Ses lieutenants ne se font d'ailleurs pas faute de comparer la direction du Parti Socialiste à Jacques Chirac, frappés les uns comme les autres "d'autisme politique".
Ce qu'il faut souligner c'est encore que ce PS qui se déchire sur le nom de son candidat en 2007 reste obstinément muet sur le programme que celui-ci y défendra. Et pour cause! C'est uniquement sur l'impopularité grandissante de la droite au gouvernement que comptent tous les leaders socialistes pour marquer leurs différences et revenir aux affaires en 2007. Moins on en dit, mieux on se porte au Parti Socialiste, et plus il y a de chances de se faire entendre, y compris de l'électorat du centre dont son candidat aura besoin pour l'emporter, et il n'est pas question de faire la moindre promesse sur laquelle les électeurs des milieux populaires pourraient demander des comptes. Pas question, par exemple, d'annoncer qu'il reviendra, si son candidat est élu, sur tout ou partie des mesures prises par Chirac contre le monde du travail. Au contraire même, pourrait-on dire! Les propos tenus par les dirigeants du Parti Socialiste expriment une profonde défiance vis-à-vis de l'écoeurement et de la colère populaire qu'ont exprimés les résultats du référendum. "Il ne s'agit pas de décrire les malheurs et d'attiser les peurs", a déclaré Martine Aubry. Et pour Daniel Vaillant, pas question "d'additionner toutes les revendications et tous les mécontentements catégoriels". C'est avec cette attitude méprisante que ces gens, qui se voient déjà de retour dans les ministères, parlent de nécessités vitales pour le monde du travail! Ils ne veulent pas être soupçonnés de reprendre tant soi peu à leur compte ces aspirations, qu'ils taxent volontiers, dans un amalgame qui n'est pas innocent, de "populisme". Dans leurs plans, s'il y a des engagements à prendre, ce ne sera pas vis-à-vis de la population ouvrière, mais d'autres couches plus proches de l'électorat traditionnel de la droite. Ces notables du PS qui ne raisonnent qu'en termes électoraux considèrent les voix ouvrières comme acquises. Ecoeurés par la droite, oublieux de la politique menée auparavant par la gauche, les travailleurs n'auraient pas d'autre choix que de voter PS en 2007. D'autant plus que l'épouvantail du 21 avril 2002 est prêt à ressortir de sa boîte. Il suffira de dire que ceux qui ne votent pas pour le candidat socialiste prennent une nouvelle fois la responsabilité d'éliminer la gauche au profit de l'extrême droite...
Il y a un bout de temps que les grandes manoeuvres pour la présidentielle ont commencé. Depuis la présidentielle de 2002 pourrait-on dire. Elles se sont accélérées avec la campagne référendaire et, durant les vingt-deux mois qui viennent, elles s'accéléreront encore. Bien malin qui aujourd'hui peut dire ce qui sortira et si ce sera Fabius qui portera les couleurs de la gauche unie ou un autre, si cette gauche réussira à s'unir, si même le Parti Socialiste se rangera sous la bannière d'un candidat unique ou pas? Et enfin, si le candidat de la gauche l'emportera ou pas?
Ce qui est d'ores et déjà certain, c'est que, même si ces questions occuperont le devant de la scène dans les deux années qui viennent, elles n'ont rien à voir avec les attentes essentielles du monde du travail.