"Modèles sociaux" : Tous taillés suivant le même patron10/06/20052005Journal/medias/journalnumero/images/2005/06/une1923.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

"Modèles sociaux" : Tous taillés suivant le même patron

Le nouveau Premier ministre prétend vouloir s'attaquer au chômage en cent jours, en s'inspirant du "modèle danois" et de "ses mesures tout à fait originales et respectueuses de l'exigence sociale". Pendant la campagne pour le référendum Chirac avait parlé du "modèle britannique" et du fait qu'il ne serait pas applicable en France. D'autres politiciens, ou les mêmes, ont, en leur temps, vanté le "modèle japonais" (démodé depuis la stagnation de l'économie japonaise), "rhénan" (qui aurait fait faillite), "coréen" (surtout à l'usage des pays pauvres), "hollandais" (bien déprécié par le non au référendum des électeurs néerlandais) et, naturellement, "américain" (trop marqué à droite pour bien se vendre actuellement).

Cette succession de modèles, véritable défilé de prêt-à-penser pour ministres et journalistes en mal de copie, tient beaucoup à des modes parmi tous ces gens dont le métier est de fournir des consolations au bon peuple.

Tous ces "modèles", qu'on nous présente comme concurrents, se ressemblent. Tout d'abord, si le but proclamé est de lutter contre le chômage, cela doit se faire sans toucher un centime des profits et des fortunes des bourgeois. Ainsi, au Danemark, pays à peine plus grand qu'une région française, faut-il le préciser, on nous dit que pour lutter contre le chômage les impôts sur les salaires sont très élevés (jusqu'à 63% sur les hauts salaires), mais l'impôt sur les sociétés, celui qui touche les bénéfices des bourgeois, n'est que de 27,3% (contre 34,33% en France). Il s'agit bien, au Danemark comme ailleurs, de répartir le poids du chômage uniquement entre les salariés et il n'est nulle part question de faire payer le patronat pour subvenir aux besoins des travailleurs qu'il a licenciés.

De même, d'après la presse, le modèle danois compense la totale flexibilité de l'emploi (pas de contrat de travail, pas de temps de travail défini, licenciements sans formalités, etc.) par le fait que les chômeurs touchent quatre ans d'allocations non dégressives. Or ces allocations peuvent être supprimées si le chômeur refuse les formations ou les emplois qu'on lui propose et toute une administration veille à ce que quelque chose de "convenable" lui soit proposé. Sauf que ce n'est pas le travailleur lui-même qui décide de ce qui est convenable on non pour lui et sa famille... N'importe quel travailleur qui s'est retrouvé au chômage au Danemark, en France ou sur la planète Mars sait ce que cela veut dire: succession de petits boulots, baisse du salaire, précarité sans fin.

D'ailleurs lorsqu'on nous vante tel ou tel modèle, on ne nous parle jamais de l'opinion des travailleurs concernés, mais seulement de celle des ministres, des patrons et des spécialistes à leur service. Que vaudrait un reportage sur la situation sociale en France dans lequel ne parleraient que Seillière, Sarkozy, Hollande et Chérèque?

Il est donc plus que probable que les travailleurs du Danemark pensent du modèle social danois ce que les travailleurs de France pensent du modèle social de Chirac, ce que les travailleurs de Grande-Bretagne pensent de celui de Blair, etc. Parce qu'en fait c'est le même modèle que tous ces bonimenteurs sont payés pour nous faire accepter: le capitalisme, c'est-à-dire un système dans lequel une minorité de nantis s'enrichit de l'exploitation et de l'appauvrissement de la majorité de la population.

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