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Leur société
Délocalisations : Contre les mensonges patronaux
Les délocalisations sont évoquées à tout propos pour persuader les travailleurs qu'ils sont en permanence en concurrence avec les travailleurs beaucoup moins bien payés des pays pauvres, que les patrons ne peuvent guère résister à l'attrait d'une main-d'oeuvre bien moins coûteuse et que, s'ils demandent à leurs salariés des sacrifices pour pouvoir résister à la concurrence internationale, ceux-ci ont intérêt à y consentir et à céder au chantage. Faute de quoi, c'est toute l'industrie et les emplois qui vont partir à l'étranger.
Le patronat a tout intérêt à accréditer de telles idées et à faire oublier que, loin d'être pris à la gorge par la concurrence internationale, c'est tout simplement son avidité à engranger toujours plus de profits qui explique la dégradation des conditions de travail et les licenciements.
Une étude de l'Insee permet de remettre à sa juste place ce chantage permanent exercé sur les travailleurs, non seulement parce que les licenciements dus à des délocalisations vers des pays à bas salaires ne représentent qu'une toute petite minorité des licenciements, mais aussi parce que la plupart sont le fait de très grands groupes industriels, riches à milliards.
Cette étude de l'Insee, publiée le 1er juin, portant sur "les délocalisations et les réductions d'effectifs dans l'industrie française", estime que 95000 emplois industriels auraient été supprimés en France et délocalisés à l'étranger entre 1995 et 2001, soit 13500 par an, alors que l'ensemble des suppressions d'emplois dans l'industrie (licenciements et fins de CDD) est de l'ordre de 500000 par an.
"Environ une fermeture d'établissement industriel sur 280 correspondrait à une délocalisation vers un pays à bas salaires, soit un peu moins d'un emploi détruit sur vingt" ajoute l'étude de l'Insee. En fait, la majorité des emplois délocalisés (7175 par an) l'est vers les pays développés, l'Espagne arrivant en tête devant l'Italie, l'Allemagne et les États-Unis.
L'étude montre enfin que les délocalisations sont surtout le fait de très grands groupes: "Les groupes ou entreprises indépendantes de plus de 500 salariés représentent moins de la moitié de l'emploi industriel, mais plus des deux tiers des emplois délocalisés." Les très grands groupes employant plus de 5000 salariés en France représentent à eux seuls plus de la moitié des emplois délocalisés. Et sur la période 1995-2001, seulement dix d'entre eux ont concentré près du quart des suppressions d'emplois dans le cadre de délocalisations, toujours d'après l'Insee.
Cette étude va donc à l'encontre de la propagande des patrons et du gouvernement qui amplifient volontairement le phénomène des délocalisations, avec le soutien zélé des médias. Comme le montre l'enquête de l'Insee, ceux qui délocalisent sont le plus souvent les grands groupes qui font d'énormes profits qui leur permettent justement, entre autres, d'acheter des entreprises dans d'autres pays. Ils ont de quoi maintenir leurs emplois tout en investissant ailleurs. Et les travailleurs ont toutes les raisons de s'opposer aux suppressions d'emplois, délocalisations ou pas!