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Dans le monde
Grande-Bretagne : Le prétendu "miracle économique"
À en croire les médias en France, Blair aurait fait de la Grande-Bretagne un pays riche (ce qu'elle a toujours été), où la population dans son ensemble bénéficie de cette richesse: le chômage, nous dit-on, serait inconnu, les revenus des travailleurs seraient protégés par un salaire minimum et les services publics crouleraient sous les investissements. Or, de toute évidence, ce n'est pas ainsi que l'électorat populaire britannique voit les choses.
Et pour cause, car si les statistiques officielles montrent depuis des années une montée rapide de la richesse nationale, elles montrent aussi un élargissement encore plus rapide du fossé entre les catégories sociales les plus riches et les plus pauvres. Le fait que 15% des enfants vivent dans des foyers dont le revenu est en dessous du seuil de pauvreté en dit long!
Si les chiffres du chômage ont dégringolé depuis 1997, c'est pour une raison bien simple: en aggravant le système punitif d'"aide" aux chômeurs de leurs prédécesseurs, les travaillistes ont poussé un nombre croissant de chômeurs dans des emplois précaires, quitte à ce que ce ne soit que quelques heures par semaine. Dès lors, ils ne sont plus comptés comme chômeurs et le tour est joué.
Pour compenser, Blair a mis en place un système d'allocations sur mesure réservé aux titulaires de ces micro-emplois. Ainsi a-t-il fait disparaître la majorité des chômeurs des statistiques en les faisant travailler pour toucher l'aide sociale. Quant aux chômeurs les plus âgés, ils ont été mis dans la catégorie des handicapés et invalides, dont le nombre a battu des niveaux records ces dernières années, entre 2,5 et 3 millions d'individus.
La réalité, c'est qu'un demi-million d'emplois permanents ont disparu dans l'industrie depuis 1997. Ils ont été remplacés, bien sûr, mais par des emplois précaires, temporaires ou à temps partiel, mais toujours sous-payés.
Le fameux salaire minimum, que l'on présente comme une grande "réalisation sociale" de Blair, se monte à la grandiose somme de 7 euros de l'heure, alors que le coût de la vie est environ 50% plus élevé qu'en France! Et c'est ce chiffre qui sert désormais de salaire de référence pour des millions de travailleurs employés dans les services industriels ou autres, mais aussi dans bon nombre de grandes entreprises. Alors, évidemment, ceux qui le peuvent font autant d'heures que possible et il n'est pas rare qu'un salarié travaille 60 ou 70 heures par semaine, sans pour autant gagner plus que le minimum nécessaire pour boucler ses fins de mois.
Quant aux services publics, s'il est vrai que les travaillistes en ont beaucoup augmenté le budget d'investissement, il faut dire qu'une grande partie de ces milliards sont destinés à aller directement dans les poches de "consortiums" privés qui, dans le cadre de contrats de partenariat à long terme avec l'État, assurent la construction (ou rénovation) des installations et leur gestion. Et comme il faut bien que les profits de ces intermédiaires viennent de quelque part, ils viendront des caisses de l'État et de toutes les astuces qu'ils pourront trouver pour réduire leurs coûts, quitte à offrir des services plus réduits ou de mauvaise qualité, quitte aussi à tirer sur le salaire et les effectifs du personnel.
Déjà, tout un "marché" artificiel a été créé dans la Santé par les travaillistes, dans lequel hôpitaux et médecins opèrent comme des entreprises commerciales. La combinaison de ce "marché" et de l'ouverture des portes aux partenaires privés a entraîné une dégradation rapide des services hospitaliers et est en train de rendre les soins médicaux les plus élémentaires de plus en plus inaccessibles aux catégories les plus pauvres de la population.
En fait, les milliards investis dans les services publics par les travaillistes auront surtout offert à toute une galaxie d'entreprises une véritable manne, dont certaines dépendent entièrement et qui ont ainsi une façon supplémentaire de vivre aux crochets du budget de l'État.