Le textile à Calais : Les capitalistes français investissent en Asie28/04/20052005Journal/medias/journalnumero/images/2005/04/une1917.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Le textile à Calais : Les capitalistes français investissent en Asie

De nombreuses entreprises dentellières ont fermé en France. À Calais, le secteur de la dentelle, teinture et lingerie comptait 6000 ouvriers dans les années 1980. Il en reste 2000 aujourd'hui.

L'usine de dentelle Noyon en est à son troisième plan de licenciements. Chez Darquer -qui dépend du groupe Noyon- neuf ouvriers sont jetés à la rue, pour éviter un plan social obligatoire au-delà de neuf licenciements.

La majorité des travailleurs de ces entreprises -mis à part les tullistes, travaillant sur les métiers leavers dans la dentelle et dont les salaires sont en forte diminution- gagnent à peine plus que le smic après plusieurs dizaines d'années de travail.

Le quotidien local Nord Littoral a publié une série d'articles mettant en valeur les patrons dentelliers de Calais qui s'installent en Thaïlande. Les conditions de vie et de travail y sont très dures. Ce qui attire les patrons, "c'est avant-tout le prix de la main-d'oeuvre. Le salaire minimum se situe entre 2,70 et 3,50 euros par jour, selon la région. La Thaïlande oblige à un minimum de droits sociaux: 8 heures de travail maximum [par jour] ou 48 par semaine, 13 jours fériés par an, au moins 6 jours de congés annuels."

Ainsi, l'entreprise Brunet s'est installée en Thaïlande depuis cinq ans, avec des métiers venus de Dentex aux Pays-Bas, une usine qui venait de fermer. Quant au groupe dont dépend Desseilles, il y a inauguré l'an dernier une usine via Opale-Lace. La direction vante "la cantine sur place, et sa qualité, des espaces détente comme le terrain de foot, le panier de basket ou la salle de gym qui se construit, mais aussi une couverture sociale décente par rapport à ce qui se fait en Thaïlande", dans ce pays où la misère est telle que les patrons occidentaux peuvent passer pour des bienfaiteurs. Une employée thaïlandaise, dans le commercial à Bangkok, raconte: "Parfois je pars très tôt, cinq heures du matin. Je peux finir très tard. Parfois aussi, je n'ai pas le temps de manger."

Le gouvernement thaïlandais veut "accompagner et aider les entreprises", en particulier par le remboursement de taxes et "sur le plan politique la stabilité et le régime du roi Bhumibol Adulyadej apparaissent comme un point positif". À l'entrée de Brunet sont accrochés les portraits du roi et de la reine, un hommage à la dictature monarchiste qui garantit, pour le moment, la paix sociale et la soumission des ouvriers aux conditions draconiennes des patrons.

Le groupe Noyon, associé au groupe sri lankais MAS, s'est installé dans ce pays encore plus pauvre que la Thaïlande sous le nom de Noyon Lanka. La "politique ambitieuse" de ce groupe, c'est de profiter de cette pauvreté, en imposant aux ouvriers des semaines de 60 heures pour un salaire de 35 euros mensuels! Un responsable se vante du petit village avec équipements sportifs construit autour de l'usine, d'où les employés viennent travailler toute la semaine et ne repartent chez eux que le week-end.

Le travail à la chaîne de "milliers de femmes qui répètent inlassablement le même geste pour, à la fin, sortir petites culottes et soutiens-gorges" rapporte de gros profits. Les usines y sont plus grandes et plus modernes qu'à Calais et l'exploitation aussi.

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