Non à Chirac... et à la Constitution européenne !22/04/20052005Journal/medias/journalnumero/images/2005/04/une1916.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Editorial

Non à Chirac... et à la Constitution européenne !

Lors de l'émission télévisée où il est venu défendre le «oui» au prochain référendum sur la Constitution européenne, face aux questions de certains participants sur le chômage ou la précarité, Chirac, pour toute réponse, s'est borné à déclarer que ces problèmes ne relevaient pas de la Constitution, et que ses interlocuteurs avaient tort d'avoir peur de l'avenir.

Mais qu'est-ce qu'il y a donc dans la Constitution européenne qui, d'après les partisans du «oui», ceux de droite comme la plupart des dirigeants du Parti Socialiste, mériterait que les électeurs l'approuvent? Le fait, nous a dit Chirac, qu'elle prône «une économie sociale de marché», qui ferait partie des valeurs auxquelles il est attaché. «Sociale», le mot sonne bien... mais ce n'est qu'un mot, et qu'un mensonge. Il suffit de voir comment il se traduit dans la réalité.

Trois millions de chômeurs en France, dont une partie plongée dans une profonde misère, les licenciements collectifs et les fermetures d'entreprises qui se succèdent sans discontinuer, la précarité généralisée, des rythmes de travail en constante augmentation pour compenser les baisses d'effectifs, des horaires de travail «flexibles» entravant toute vie de famille pour beaucoup, la baisse du niveau de vie pour tous: voilà, pour les travailleurs, le «social» dont Chirac est tout fier et qu'il veut pour toute l'Europe.

Des retraites amputées, des maisons de retraite pour les personnes âgées dépendantes en nombre insuffisant et au budget rogné, et un gouvernement qui ne trouve, pour faire face à cette pénurie, rien d'autre que de voler un jour férié aux travailleurs: voilà une autre facette de ce «social».

Des services publics en déliquescence. Des hôpitaux fermés. D'autres où, du fait des fermetures de lits ou de services, des malades sont hébergés des journées entières dans des couloirs, où les Urgences sont en permanence débordées. Des écoles où l'on supprime des classes et des postes d'enseignement. Des bureaux de poste ruraux qui ferment. Un manque criant de logements décents accessibles aux travailleurs (avec les conséquences que cela peut entraîner, comme les vingt-deux morts, dont onze enfants, dans l'incendie d'un hôtel parisien où étaient logés des familles, en attente depuis des années parfois d'un logement social). Des transports en commun toujours aussi insuffisants. Voilà le «social» de Chirac, pour tous ceux qui ne disposent pas d'une fortune personnelle permettant d'échapper à tout cela.

Et Chirac a eu le front de conclure que «l'économie sociale de marché est un système où tout le monde peut s'enrichir». Mais de qui se moque-t-il, à un moment où le nombre de pauvres n'a jamais été aussi grand? La réalité est que les riches sont de plus en plus riches, et que la population laborieuse vit de plus en plus mal.

Ce n'est certes pas l'Europe qui est responsable de cela: c'est le grand patronat qui, profitant du chômage créé par son propre système économique, s'attaque sans répit au monde du travail avec la complicité des gouvernements à son service. C'est une situation que nous connaissons depuis des années, pendant lesquelles, de Mauroy, Fabius, Rocard et Jospin à Balladur, Juppé et Raffarin, tous les gouvernements, sous prétexte de rendre l'économie française «compétitive», ont multiplié les subventions et les dégrèvements de charges sociales pour le patronat, au détriment de la Sécurité sociale et des services publics.

Ce n'est pas l'adoption de la Constitution européenne -si elle était adoptée- qui aggravera cela, tout comme son rejet ne l'empêcherait pas. Mais nous n'avons aucune raison de dire «oui» à un texte qui fait de la course au profit à laquelle se livrent les capitalistes, sans égards pour les travailleurs qui en sont victimes, le meilleur système économique possible.

Dire «non» est la réponse qui s'impose. Même si elle ne nous dispensera pas, pour faire reculer patronat et gouvernement, de montrer aux possédants, dans les grèves et dans la rue, que les travailleurs ne se laisseront pas toujours faire.

Arlette LAGUILLER

Éditorial des bulletins d'entreprise du 18 avril

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