IVG : Reconnaître le droit dans les textes et dans les faits22/04/20052005Journal/medias/journalnumero/images/2005/04/une1916.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

IVG : Reconnaître le droit dans les textes et dans les faits

Jack Lang, secrétaire national du PS et porte-parole de ce parti pour sa campagne pour le « oui » au référendum, s'est élevé, durant une émission de France Inter diffusée mardi 19 avril, contre ceux et celles qui prétendraient que le droit à l'avortement serait menacé dans la Constitution européenne.

Personne n'a jamais prétendu que la Constitution européenne menacerait ce droit. Mais ce qui est vrai, et que Lang se garde bien de dire, c'est que cette Constitution ne reconnaît nulle part le droit à l'interruption volontaire de grossesse, laissant le soin de légiférer en ce domaine aux États nationaux. Au lieu d'élargir les droits des femmes, elle entérine les législations réactionnaires des pays comme le Portugal, l'Irlande ou la Pologne, avec la bénédiction du «socialiste» Jack Lang.

D'ailleurs, l'article II-62 du projet de Constitution européenne stipule que «toute personne a droit à la vie». C'est une satisfaction donnée à tous ceux pour qui l'embryon est, dès la fécondation, une «personne». Autrement dit à l'Église, «Laissez-les vivre» et autres bigots.

Même en France, tout n'est pas résolu en ce domaine. Le fait qu'après bien des années de lutte les femmes aient arraché ce droit à l'IVG et qu'en 1975 ait été votée la loi Veil a certes constitué un énorme progrès. Mais s'il est légalement possible d'avorter depuis trente ans, des difficultés multiples poussent encore de nombreuses femmes à partir à l'étranger.

Une enquête réalisée par la Direction régionale des affaires sanitaires et sociales d'Ile-de-France, la DRASSIF, révèle qu'elles sont près de 5000 chaque année et que, si un grand nombre d'entre elles avaient dépassé le délai légal français de 12 semaines pour avorter, le tiers avait pourtant formulé la première demande d'IVG dans les délais.

Souvent ces femmes ont essayé de trouver une solution dans leur département, en vain, y compris dans les départements d'Ile-de-France, pourtant les mieux dotés en médecins et structures hospitalières. Il existe de grandes inégalités de situation d'un endroit à l'autre de l'hexagone. Près de la moitié des 857 services de gynéco-obstétrique ne font pratiquement pas d'avortements. À l'inverse, vingt services réalisent à eux seuls un cinquième des IVG. À Paris, 62% des IVG sont effectués dans seulement six centres de l'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris.

Parmi les nombreux obstacles que rencontrent les femmes, on trouve le manque de places, la pénurie de personnel. Rares sont les départements disposant de personnel qualifié pour l'IVG. Ainsi dans le Val-d'Oise, à Gonesse, aucun médecin n'a été recruté spécifiquement pour les réaliser. Des médecins refusent parfois tout bonnement de pratiquer des IVG, en opposant la clause de conscience. Il est possible que dans un service personne n'accepte de les faire. Il existe ainsi des maternités ne réalisant pas les IVG, alors qu'il s'agit d'une obligation réglementaire. Des établissements refusent aussi parfois de réaliser des IVG tardives, ou bien encore les réservent aux seules patientes des gynécologues libéraux de la clinique. Dans ce domaine comme dans d'autres, ce sont les femmes des classes populaires qui se retrouvent le plus en difficulté.

Il faudra donc encore se battre pour que toutes les femmes, en Europe et bien au-delà des frontières européennes, aient le droit de choisir librement d'avoir un enfant, et donc d'interrompre volontairement une grossesse, et que ce droit soit reconnu dans la loi et dans la pratique.

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