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Israël-Palestine : Sharon poursuit la colonisation sous l'oeil complice de Bush
La visite au président américain Bush du Premier ministre israélien Sharon, venu chercher un soutien pour sa politique, où se mêlent promesse d'un retrait de la bande de Gaza et poursuite de la colonisation en Cisjordanie, se solde par un bilan fort satisfaisant pour Sharon.
Le président américain a rappelé qu'il souhaite "ne pas voir Israël prendre des initiatives qui contredisent ses obligations à l'égard de la feuille de route". Qu'en conséquence, le gouvernement israélien doit "démanteler les implantations illégales" en Cisjordanie. Mais de telles demandes ont été maintes fois formulées sans que sur le terrain rien de significatif ne se produise, surtout de la part des Israéliens.
Et puis que peut bien signifier "implantations illégales"? Au regard des revendications palestiniennes, toutes les implantations israéliennes de Cisjordanie et de Gaza sont "illégales". Par contre, pour les dirigeants américains et israéliens, bien peu seulement le seraient: quelques caravanes posées ici ou là au sommet des collines. Ce qui fait qu'aux termes des entrevues, l'un et l'autre pourraient être satisfaits, surtout Sharon qui, tout en prétendant que des démantèlements interviendraient en temps voulu, a pu réaffirmer que les quelque 240000 colons israéliens présents en Cisjordanie dans les "grandes colonies" y resteraient quoi qu'il arrive et quel que soit l'accord qui pourrait aboutir entre dirigeants palestiniens et israéliens à propos de la Cisjordanie.
La "feuille de route", ce plan concocté en 2002 par les États-Unis, la Russie, l'Union européenne et les Nations unies, prévoit le gel de la colonisation israélienne et la création d'un État palestinien aux côtés d'Israël. Mais la route qui conduit à la création d'un État palestinien s'est, depuis, perdue dans les sables de la colonisation de la Cisjordanie, et le conflit s'est envenimé qui plus est par la construction de ce mur honteux qui entend séparer Israël du futur État palestinien.
S'il prétend mettre un terme à la colonisation des 8000 colons de Gaza, Sharon entend bien qu'elle se poursuive en Cisjordanie. D'ici à ce que les négociations avec les Palestiniens aboutissent, ce sera autant de nouveaux colons installés et autant de parcelles supplémentaires de territoire palestinien annexées à Israël.
La colonisation se poursuit notamment à Maalé Adounim, où les autorités israéliennes viennent d'annoncer la construction de 3500 logements. Ces nouvelles constructions vont avoir pour effet, non seulement de relier à Jérusalem la colonie la plus importante de Cisjordanie (elle compte 28000 habitants), mais aussi de couper en deux la Cisjordanie et d'y rendre donc encore plus difficile la situation des Palestiniens.
Si Washington voulait faire avancer le règlement du conflit entre Israéliens et Palestiniens, il s'y prendrait tout autrement et exigerait du gouvernement israélien des retraits autrement plus conséquents que ceux concernant quelques "implantations illégales". Des moyens, l'administration américaine en a, ne serait-ce qu'en arrêtant d'aider financièrement l'État israélien, ce qu'elle a maintes fois menacé de faire mais sans jamais ajouter le geste à la parole. Au contraire de cela, Bush admet qu'" un retour aux frontières de 1949 serait irréaliste". Pendant la dernière campagne présidentielle, Bush avait dit qu'il n'imposerait aucune action qui mettrait en cause la sécurité d'Israël. Et, comme à chaque demande, même minime de sa part, Sharon brandit l'argument de la sécurité, la reprise d'un "processus de paix" est toujours remise... à plus tard. Comme tandem hypocrite, on ne peut faire mieux.
Après cette rencontre, les dirigeants palestiniens ont protesté auprès de Washington sur le fait que ne pas en revenir aux frontières de 1949, cela revient à entériner toute la colonisation israélienne de la Cisjordanie. Ce à quoi, Bush et Sharon ont répondu en choeur que les dirigeants palestiniens devaient avant toute chose démanteler les groupes armés palestiniens, ce qu'ils sont bien incapables de faire, et que de toute façon ils auraient bien tort de faire. En revanche, Bush et Sharon n'ont rien dit des obus de mortier tirés par l'armée israélienne, ce week-end des 9 et 10 avril, et qui ont entraîné la mort de trois adolescents palestiniens dans la Bande de Gaza.
Bush peut bien, de temps à autre, faire semblant de hausser le ton mais pour l'essentiel il laisse faire Sharon, qui lui poursuit sa politique colonisatrice au détriment des Palestiniens.