Réquisition des logements vides : Une loi qui n'est pas appliquée17/03/20052005Journal/medias/journalnumero/images/2005/03/une1911.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Réquisition des logements vides : Une loi qui n'est pas appliquée

L'État dispose d'une loi pour réquisitionner les logements vides. C'est l'ordonnance de 1945, réactualisée en juillet 1998.

Le représentant de l'État dans le département, c'est-à-dire le préfet, peut réquisitionner des logements vacants, pour une durée d'un an au moins et de six ans au plus; l'ordonnance de 1945 précisait qu'il s'agissait de locaux à usage d'habitation "inoccupés ou insuffisamment occupés", le manque de logements dans l'après-guerre ayant laissé ouverte la possibilité de partager des habitations. Au fil du temps, la loi a été modifiée: un décret précise quels sont les locaux concernés. Les locaux appartenant à une personne morale (banques, assurances, etc.) sont également susceptibles d'être réquisitionnés s'ils sont vacants depuis plus de dix-huit mois.

Les bénéficiaires peuvent être des personnes dépourvues de logement, expulsées ou hébergées dans de mauvaises conditions et justifiant de ressources inférieures à un plafond fixé par décret.

Les propriétaires ne peuvent se soustraire à la réquisition et une ordonnance de septembre 2000 est censée punir d'un an d'emprisonnement et de 15000 euros d'amende "le fait de dissimuler, par des manoeuvres frauduleuses, la vacance de locaux et de détruire ou de dégrader les locaux faisant l'objet d'une réquisition"; le tribunal peut également obliger les contrevenants à remettre les locaux en état.

Les locataires doivent, en échange, occuper les lieux "paisiblement et en bon père de famille", selon les termes consacrés de l'ordonnance de 1945, et payer un loyer. En pareil cas, le prix de base mensuel est fixé, à compter du 1er janvier 2005, à 6,13euros le m² à Paris et dans les communes limitrophes, à 5,25euros en Ile-de-France et à 4,37euros ailleurs.

On voit que tout est prévu par la loi, y compris des loyers de 300 euros environ, dans Paris, pour un appartement de 50m². C'est peu, comparé aux prix du marché. Mais comparé aux revenus des locataires à la recherche d'un toit, c'est encore parfois considérable.

Le problème est que la loi n'est pas appliquée. En 2001, le DAL chiffrait à 2 millions le nombre de logements vides, dont 136554 à Paris, soit un logement sur dix. Or, les "réquisitions" annoncées par les différents gouvernements ont toujours porté sur des chiffres dérisoires par rapport aux besoins et ont rarement été menées à leur terme. En mars 2001, le ministère du Logement avait annoncé un plan de 300 réquisitions; en octobre 2003, Jean-Louis Borloo avait promis de reloger avant Noël 500 familles mal logées mais en octobre 2004, elle étaient encore 250 sur le pavé!

La loi de Cohésion sociale, du même Borloo, prévoit que les collectivités publiques pourront, grâce aux fichiers des taxes d'habitation, cibler les logements privés vacants et déterminer pourquoi les propriétaires ne louent pas. Voilà qui augmentera sans doute le travail des statisticiens mais ne résoudra sûrement pas le problème du logement: ce ne sont pas les "cibles" qui manquent mais la volonté politique.

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